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10
Décembre 2024 : Du
congélateur
au micro-ondes… et de la
langue de bois à la gueule
de bois

Le
spectacle
que nous donne depuis des
semaines la politique
française
estparticulièrement
affligeant. Les intérêt
partisans et les petites
combines d’appareil
prennent le pas sur les
problèmes sociaux du pays.
Les uns ne pensent qu’à
l’électionprésidentielle à
venir : Marine Le
Pen, menacée d’être
condamnée à l’inégibilité,
voudrait accélérer les
échéances, tout comme
Jean-Luc Mélenchon qui se
sentvieillir et voudrait
très vite un second tour
face à elle (ce qui la
ferait sans doute
l’emporter), Laurent
Wauquier ne veut pas se
mouiller pour ne pasavoir
de passif, comme Gabriel
Attal qui, ne sentant pas
prêt, n’est
pas pressé. D’autres, en
particulier chez les
socialistes, pensent aux
législatives et ne veulent
pas insulter l’avenirpour
s’assurer des désistements
qui les feront réélire,
etc.
Le
résultat,
nous l’avons tous sous les
yeux. Pas d’idées
nouvelles, aucune
proposition, rien. Ou
encore des propositions
sans financement. On
ressort du congélateur les
vieuxéléments de langage,
une langue de bois que
l’on passe au micro-ondes
et qu’on nous ressert. Les
politiques passent les
plats comme on l’apprend à
l’école hôtelière, parfois
avec style, mais leurs
plats sont le plus souvent
réchauffés. Au bout du
compte, ils sont tous
commeEmmanuel Macron, le
Président de la
république, qui s’accroche
désespérément à ses idées
qui deviennent éculées
comme le naufragés du
radeau de la Méduse
s’accrochaientà leurs
planches et bouffaient
sans doute les plus
faibles.
Mais
sous
ces pesantes langues de
bois, nous risquons bien
d’avoir au bout du
comptetous la gueule de
bois.
1er
Décembre 2024 : Le bal des
faux-culs
Je
pourrais
citer de nombreux autres
exemples, venant de différents
pays, mais je vais m’en tenir
ici au numéro du quotidien
tunisien La
Presse du 27 novembre
2024. Dans un éditorial en
page une, traitant de la
décision de la Cour Pénale
Internationale de lancer un
mandat d’arrêt contre
Netanyahou, et dans un article
en page 7 on lit
successivement « premier
ministre
sioniste, appareil d’Etat
sioniste, occupants
sionistes, Etat sioniste,
entité sioniste, frappes
sionistes, diplomatie
sioniste, armée sioniste,
soldat sionistes». Et, à
la fin de l’édito, on trouve
cette phrase dans laquelle
apparaît soudain le nom
d’Israël :
« La
question
qui se pose maintenant est de
savoir si les pays
occidentaux, alliés d’Israël,
respecteront les normes
internationales ou
privilégieront leur alliance
avec l’Etat sionistes ».
On peut y voir la volonté
stylistique de ne pas répéter
deux fois sioniste dans
la même phrase, ou
l’utilisation d’Israël lorsqu’on
traite des pays qui le
reconnaissent mais, surtout,
la preuve que dans tout ce qui
précédait, sioniste était
synonyme d’israélien.
Langue
de
bois ? Bien sûr, mais
qu’il faut analyser plus
précisément. Car il y a
dans l’adjectif sioniste autre chose que ce que nous
dirait un dictionnaire (par
exemple : « Doctrine
et
mouvement politique dont le
but est la construction, la
consolidation et la défense
d'un État juif en Palestine,
près de Jérusalem »), une
volonté d’invisibiliser Israël, de nier son
existence en tant qu’état. Dès
lors se pose une
question : en quoi ce
remplacement systématique d’israélien par sioniste fait-il
avancer la cause
palestinienne ? Et que
fait l’état tunisien (qui
contrôle très largement la
presse) pour cette
cause ? Rien, bien sûr,
mais nous y reviendrons.
D’un
autre
côté en effet, les appels à
l’instauration de deux états
et les appels à
la paix se multiplient. Or, si
faire la paix c’est faire
taire les armes, le minimum
serait alors de ne plus en
livrer. Or ni Israël, ni le
Hamas ni le Hezbollah n’ont
les moyens de mener la guerre
sans les livraisons des
Etats-Unis pour le premier, de
l’Iran pour les seconds.
Qu’attendent donc ceux qui
appellent la paix de leur vœux
pour mettre les Etats-Unis et
l’Iran sous embargo ?
L’embargo sur l’Afrique du Sud
ne fut pas pour rien dans la
fin de l’Apartheid. Pourquoi
ne pas boycotter tous les
produits venant de l’état
voyou qu’est Israël ? Et
ne pas boycotter tous les
produits venant du fournisseur
d’armes que sont les
Etats-Unis. Et que dire des
pays arabes (le Maroc,
l’Egypte, etc.) qui
entretiennent des relations
diplomatiques avec
Israël ? Le traiter d’entité
sioniste ne signifie
rien : il s’agit d’un
pays qui existe, dont le
gouvernement mène une
politique colonialiste et
criminelle, politique dont bon
nombre de pays arabes sont les
premiers bénéficiaires. Le
prix des tomates ou du pain
augmente, le peuple
gronde ? On suscite des
manifestations
« antisionistes » ou
« pro-palestiniennes »
qui font oublier un temps les
problèmes locaux ! Et on
passe à autre chose.
Quant
aux
manifestations dans les pays
occidentaux, elles profitent
sans doute aux vendeurs de
keffiehs noirs et blancs,
qu’on y porte pour marquer son
soutien à la Palestine, avant
d’aller boire un coup au
bistrot le plus proche. Et
j’imagine très bien qu’un jour
proche ces keffiehs seront
produits en France par la
haute couture… Ce serait très
chic de défiler avec un
keffieh Hermès, mais cela
n’empêcherait en rien le
massacre des Gazaouis à l’aide
d’armes américaines.
Ce
bal
des faux-culs est désespérant. Что
дѣлать? « Que faire ? », écrivait
Lénine dans un tout autre
contexte. Que faire en effet.
Mais j’avoue que quand je vois
certains de mes collègues,
keffieh autour du coup,
affirmer leur soutien au
peuple palestinien avant de
présenter une communication
sur les études postcoloniales,
ou sur la syntaxe du kirghize
ou encore, pourquoi pas, sur
la vie amoureuse des
moustiques, cela me fait rire
jaune.
22 Novembre 2024 : Symbolisme
et inefficacité
Elon
Musk
sera donc le cost killer du
futur gouvernement de Trump.
Ce qui signifie qu’il va
couper à fond dans les
dépenses publiques et
multiplier ses propres
bénéfices sur le compte du
budget de l’état. On n’est
jamais mieux servi que par
soi-même.
En
attendant
de se remplir un peu plus les
poches, il inonde son compte
X (ex twitter), désormais
débarrassé de toute régulation
ou modération, de messages de
plus en plus fantaisistes.
S’appuyant sur les
déclarations d’un chanteur
anglais selon qui les prisons
européennes étaient remplies
de gens critiquant le
politiquement correct, il a
lancé que l’Angleterre
devenait un état policier.
Puis, commentant des courbes
de natalité en baisse, il a
expliqué que l’Europe se
mourrait…
Désormais
ceux
qui s’intéressent à
l’information, au premier rang
desquels les journalistes,
doivent passer plus de temps à
vérifier et à démentir les fake
news qu’à en chercher
des fiables. Les quotidiens
britannique The Guardian et
espagnol La Vanguarda avaient
déjà suspendu leurs comptes X,
il viennent d’être suivis par
le français Ouest France.
Ce
dernier
explique qu’il « ne
semble en effet ni judicieux
ni opportun d’’y être actif,
tant que de sérieuses
garanties ne sont prises
face à la désinformation,
face au harcèlement et face
à la violence ».
On
peut
douter de l’efficacité de ces
décisions, qui n’enlèveront
pas grand-chose aux bénéfices
d’Elson Musk, qui a par
ailleurs environ deux cents
millions de followers avides de ses mensonges. Mais
il ne faut pas négliger la
valeur symbolique de la
démarche de ces trois
quotidiens.
Autre
décision
sans doute plus symbolique
qu’efficace, celle de la Cour
Pénale Internationale, qui
vient de lancer un mandat
d’arrêt de Netanyahou et de
son ancien ministre de la
défense pour crimes de guerre
et crimes contre l’humanité
dans la bande de Gaza.
Netanyahou a crié à une
nouvelle « affaire
Dreyfus » et la
population du pays, droite et
gauche confondues, semble
le soutenir… Théoriquement le
dirigeant israélien ne pourra
pas se déplacer dans plus
d’une centaine de pays, sous
peine d’être immédiatement
arrêté. Mais on doute que
beaucoup aient le courage
d’appliquer ce mandat.
Quoiqu’il
en
soit, dans le cas de X comme
dans celui de Netanyahou, même
si elles sont inefficaces, ces
décisions sont plutôt une
bonne nouvelle. Il est en
particulier important
d’en finir avec l’impunité
d’un état voyou comme celui
d’Israël qui non seulement ne
respecte aucune décision
internationale mais en outre
est en train, à coup de
massacres inhumains, de
préparer une nouvelle
colonisation du territoire
palestinien. Que les
Israéliens acceptent les
pratiques honteuses de leur
gouvernement et de leur armée,
c’est leur problème. Que la
communauté internationale
ferme les yeux sur ces crimes,
cela a assez duré.
11 Novembre 2024 : Retraite
Pour
l'appel au peuple du 8
novembre, c'est réglé, merci.
Il s'agissait d'une pièce
d'Alberto Moravie, Il
mondo é quelle che é. Nous
pouvons donc passer à autre
chose.
Si
l’on
regarde d’une œil bienveillant
(enfin, n’exagérons rien) le
programme, ou les promesses de
campagne, de Trump, il y a de
quoi être rassuré. Il a en
effet annoncé qu’il serait
dictateur le premier jour de
son mandat pour fermer les
frontières (il est d’ailleurs
très modéré, car vivant en
Floride il aurait pu penser à
jeter tous les étrangers aux
alligators… ) et « forer,
forer, forer »
(c’est-à-dire inonder son pays
de pétrole. Puis qu’il
réglerait l’affaire
ukrainienne en un seul jour et
le problème palestinien
(enfin, il ne prononce pas cet
adjectif, disons le problème
du Proche Orient) en
un tour de main. En quelques
jours, voire deux ou trois
semaines, tous les problèmes
du monde seront donc résolus.
C’est
rassurant,
non ?.
Pourquoi rassurant? Parce
qu’il pourra prendre sa
retraite dès le 31 janvier,
pardi !
8 Novembre 2024 : Appel
au
peuple
Du
moins
appel au peuple qui connaît la
littérature italienne et a de
la mémoire. Je suis à la
recherche d’un livre que j’ai
lu au début des années 1960
(je crois qu’il s’agissait
d’une pièce de théâtre) dans
lequel une société un peu bobo
pratiquait une sorte de jeu de
société. Il y a avait des parole
malate (des mots
malades) qu’il ne fallait pas
prononcer et si quelqu’un le
faisait les autres s’écriaient multa ! multa ! (amende !).
Je ne retrouve ni le nom de
l’auteur ni celui de l’œuvre.
Ca dit quelque chose à
quelqu’un ? Et merci par
avance à qui saura me
rafraichir la mémoire, mais
j’ai absolument besoin de
retrouver ce texte.
7 Novembre 2024 : Trump
n’ira
pas (ou pas encore) en
prison ?
Comment
réagir aux résultats de l’élection
américaine ?
Se demander comment un tel clown, plusieurs
fois mis en examen ou condamné
par la justice, a pu être
réélu ?
Se demander comment des électeurs peuvent
prendre au sérieux un homme
spécialiste de bobards, de
mensonges, dont ilinonde les
réseaux sociaux ?
Se demander comment des femmes ont pu voter
pour un macho fier de
l’être ? (Au fait comment
se fait-il que l’on
trouvenormal d’intervenir par
la loi sur le corps des femmes
alors qu’aucune moi à ma
connaissance ne concerne celui
des hommes ?).
Se demander comment un homme qui, il y a
bientôt quatre ans, s’est
comporté comme un putschiste en incitant des
foules armées en envahir le
Capitole, peut redevenir
président d’un pays se
présentant
commedémocratique ?
On demander comment un bouffon, repris de
justice et qui risque le 26
novembre à New York d’être
condamné à de la prison(le
procès avait été suspendu pour
ne pas gêner la campagne) peut
être Président des
Etats-Unis ? (petite
précision : il peut
s’autoamnistier dans les
procès fédéraux mais pas dans
ceux qui se jugent devant la
justice d’un état).
Le fric est en effet l’un des moteurs de son
élection, et l’on a même de
hommes d’affaires noirs
américains votant républicains. Mais il y a aussi les
religions fondamentalistes, dont
les membres ne se font aucun
illusion sur la moralité de
l’individu mais l’élisent parce
qu’il interdira encore plus la
contraception et l’interruption
volonté de grossesse, ou parce
qu’il défendra Israël. D’autres
qui votent pour lui par haine
des migrants, par obsession des
frontières. En bref la partie du
peuple américain qui a élu Trump
se fout de la morale, des
bienséances, de la justice… Les
dizaines de millions de ses
électeurs se regroupent derrière
un slogan en forme de sigle,
MAGA (Make America Great Again).
Nous pourrions noter qu’America
est une sorte d’imposture :
l’Amérique s’étend du Sud su
Chili au Nord de l’Alaska et les
USA n’en sont qu’une petite
partie. Et il faut pas oublier
que leur « grandeur »
repose d’abord sur un génocide,
celui des « native
americans », les indiens,
et que leur expansion économique
s’est ensuite appuyée sur
l’esclavage…
Quelles seront les victimes de cette
élection ? Sûrement pas
les boursicoteurs qui se
réjouissent par avance de la
hausse du dollar. Mais en
premier lieu le peuple
Palestinien, face à Netanyahou
qui se réjouit, comme le
hongrois Orban, de l’arrivée
d’un de leurs semblables au
pouvoir américain. Ensuite
l’Ukraine, qui risque de voir
disparaître l’aide des USA. Et
puis l’économie mondiale,
celle de l’Europe en premier
lieu.
Pour revenir au procès du 26 novembre à
New-York, une question
demeure : Trump ira-t-il ou non en
prison ? Ce serait assez
original qu’il soit arrêté par
la police new-yorkaise avant
son intronisation. Qu’il
gouverne le pays de derrière
les barreaux, comme certains
mafieux gèrent leur trafic de
drogue depuis leur prison. On
peut toujours rêver…
Mais au de-delà des rêves il y a une
réalité : la démocratie
n’est jamais acquise
définitivement, elle est
fragile. Et ce qui risque se
produire aux USA pourrait bien
préfigurer ce qui se passera en
France, lors de l’élection
présidentielle de 2027.
3
Novembre 2024 : حوت
ياكل حوت وقليل الجهد يموت

Je rentre de Tunisie où s'est
tenu un colloque sur le
cinquantième anniversaire de la
publication de mon livre Linguistique
et colonialise. C'était
pour moi touchant de retrouver
des collègues ou des amis de
longue date, et passionnant
d'écouter de jeunes chercheurs
qui n'étaient pas nés il il a un
demi-siècle et développaient
parfois des positions nouvelles
ou contradictoires.
Sur l'affiche du colloque vous
pouvez voir une tête dessinée
par Kerleroux pour la couverture
d'une des éditions en poche du
livre. Dans la bulle, à
l'époque, on lisait Français
go home! A droite
un poisson dont le corps est
composé de la traduction de mon
idée de glottophagie dans différentes traductions.
Bravo au graphiste.

Mais ce qui me frappe le plus
c'est que cette composition
renvoie à un proverbe tunisien
حوت
ياكل حوت وقليل الجهد يموت
qui dit "les poissons mangent
les poissons, les plus faibles
disparaissent". Belle métaphore!
Bref je suis rentré de ce
colloque bien content.
Autre chose qui n'a rien à voir
(encore que...). La Corée du
Nord vient d'annoncer l'envoi de
10 à 12.000 hommes de troupe en
Russie pour participer à
l'invasion de l'Ukraine. Ce qui
pourrait signifier plusieurs
choses. Tout d'abord que Poutine
manque de soldats, ou
qu'il ne parvient plus à en
mobiliser malgré les grosses
sommes qu'on leur promet. Mais
peut-être aussi que le même
Poutine et Kim-Jong-un donnent à
voir les préparatifs de la
troisième guerre mondiale, qui
semble avoir d'ores et déjà
débuté. Selon certaines sources,
une partie des soldats
nord-coréens auraient pour
fonction de surveiller que les
autres ne désertent pas. En
outre, le gouvernement coréen
ferait savoir à ses troupes que
les familles des combattants
demeurant au pays, elles
constituent un moyen de pression
sur leurs rejetons s'ils ne
combattaient pas de façon
satisfaisantes....
Cette opération nous ramènent
au colonialisme et à la
linguistique d'une autre façon.
Il va de soi que si les Russes
et les Ukrainiens se comprennent
sans trop de difficultés, il n'y
a aucune intercompréhension
entre Russes et Nord-Coréens.
Les Russes auraient mis en place
un programme pour enseigner une
centaine de termes militaires
militaires russes aux
Nord-Coréens. Mais cela ne
permettrait pas vraiment de
diriger des troupes. A suivre,
donc. Une dernière chose.
Si les poissons mangent
les poissons et que les plus
faibles disparaissent, quels
seront les poissons le plus
faibles sur ce front
trilingue. Cela ne vous rappelle
pas ce qu'on appelait naguère
les tirailleurs sénégalais ou
les tirailleurs algériens?
17
octobre 2024 : Vice et vertu
Il y a en Afghanistan un
ministère au nom extrêmement
poétique : Ministère
de la promotion de la vertu
et de la répression du vice. Beau programme !
Ce ministère salutaire s’est jusqu’ici
essentiellement occupé des
femmes. Elles doivent couvrir
leur corps entièrement en
présence d’hommes
n’appartenant pas à leur
famille, ne pas faire entendre
leur voix (le
son d’une voix féminine à
l’extérieur du foyer est considéré
comme une violation morale),
celles qui ne portent pas la
burqa sont fouettées. En bref
elles ne doivent pas exciter
les hommes. Et personne n’a
pensé à une solution
alternative : crever les
yeux des hommes pour qu’ils ne
puissent plus regarder les
femmes
Je ne sais pas si c’est pour promouvoir la
vertu ou pour réprimer le
vice, mais ledit ministère
vient d’interdire la
représentation, par le dessin
ou la caricature, de toutes
les créatures vivantes créées
par Dieu : du poisson
rouge au diplodocus en passant
bien sûr par les humains.
Cette interdiction qui
découlerait de la charia n’est
pourtant pas appliquée par le
chiites : pour eux, seul
ne prophète ne doit pas être
représenté. Le Ministère
de la promotion de la vertu
et de la répression du vice devrait donc en bonne
logique condamner les
miniatures persanes, mais les
talibans ne
veulent peut-être pas se
fâcher avec l’Iran…
Certaines applications de ces beaux principes
laissent cependant rêveur.
Ainsi une
femme vient d’être condamnée à
dix mois de prison ferme pour
avoir poignardé son père. Pour
sa défense, elle a déclaré
qu’il l’empêchait de porter le
voile. Si cela était
vrai, où donc se trouve le vice
et où se trouve la vertu ?
N’est-ce pas le père qui était
condamnable ? Mais
peut-être la charia
précise-t-elle qu’entre l’homme
et la femme c’est toujours la
femme qui doit être condamnée…
Autre
condamnation
étonnante : Le
rappeur
Toomaj Salehi a été condamné
à mort pour «corruption sur
terre». N’étant pas juriste,
j’ai du mal à comprendre ce
que «corruption sur
terre » peut signifier
dans la droit islamique.
Mais si cette sentence est
appliquée, le rappeur
pratiquant la corruption sur
terre ne risque-t-il pas
d’aller corrompre le
paradis ?
12
octobre 2024 : Orchestration
sublimation

J’ai
assisté hier à Montpellier à
un concert étonnant de Bernard
Lavilliers. Il commence, seul
avec sa guitare, par Fortalezza. Puis, avec ses quatre
musiciens, il interprète cinq
autres de ses chansons et,
subitement, apparaissent
derrière eux les 55 musiciens
de l’orchestre national
de France. Pendant une
heure quinze, défilent alors
les titres de son dernier
album, Métamorphose,
harmonisée pour orchestre
symphonique.
S’ajoute
alors au plaisir esthétique
une sorte de leçon de choses
pour l’oreille. On sait qu’une
chanson, son texte, sa
mélodie, n’est jamais la même
entre deux interprétation,
qu'elle change encore lorsque
l’interprète change, mais
lorsqu’elle est somptueusement
habillée par une telle
orchestration, elle prend une
autre dimension. Et, en voyant
Lavilliers baigner dans sa
propre musique, on est proprement
subjugué, comme si son oeuvre
était sublimée par un tel
environnement musical.
Il
lui reste trois galas, à Paris
le 13 octobre, à Rouen le 19
et à Troyes le 23. Si vous
avez le temps…
4
octobre 2024 : Bis repetita
placent

Patrick
Prévost, dont j’ai publié le 2
octobre une variation sur
Aznavour/Mélenchon, y a pris
goût et récidive avec Marine
Le Pen :
Je
me vois déjà future
présidente
Goûtant
ma victoire en la savourant
d’un sourire narquois
Je
me vois déjà cheffe
omnipotente
De
la droite extrême naguère
dirigée par mon vieux papa
Je
suis la plus grande des
néo-fascistes
Quand
elle me rencontre Giorgea
Meloni me salue bien bas
Je
peux enfin dire que je suis
raciste
Et
je vais aussi pouvoir sans
remords virer Bardella !
3
octobre 2024 : Mensonges en
politique
J’ai
vu en début de semaine une
émission de l’excellent
journaliste Patrick Cohen sur
les mensonges en politique. Il
prenait deux exemples français
(la maladie de Mitterrand et
l’affaire Cahuzac) et deux
exemples américains (l’affaire
Clinton-Lewinsky et la
magouille Bush-Powell sur
l’Irak.
Sur
ce dernier point, petit rappel
historique. En 2003, Bush décide
de se payer l’Irak et, avec
l’aide d’une agence
spécialisée (Hill and
Knowlton) il monte un énorme
mensonge à plusieurs entrées.
Les Irakiens auraient par
exemple au Koweit sortis des
bébés de leur couveuse (on
annonce d’abord 15 morts et
Amnisty International, qui
tombera dans le panneau, ira
jusqu’à en annoncer 300), on
invente ensuite de pseudo sites nucléaires, et
Colin Powell ira jusqu’à
montrer à l’ONU un faux flacon
d’anthrax, arme de destruction
massive que fabriquerait
l’Irak…
Ce
qui est le plus frappant c’est
que l’histoire de Clinton a
fait beaucoup plus de bruit
que les mensonges de Bush et
de Powell. Et on ne parle plus
de ces fake news. En revanche,
l’affaire Clinton reste dans
toutes les mémoires, parce
qu’il avait menti sur une
affaire dont tout le monde
aurait dû se foutre, et qui
relevait de sa vie privée. La
façon dont il s’était défendu,
avec des arguments sémantiques
enfantins (le sexe oral n’est
pas une relation sexuelle…),
était d’ailleurs à pleurer de
rire. Pourtant, si les
mensonges de Clinton n’ont eu
aucune influences sur les
affaires du monde,
l’intervention en Irak a
bouleversé la situation
politique du Moyen-Orient.
Mais
les USA ne font jamais
d’examen de conscience, ils
considèrent avoir toujours eu
raison. Après avoir aidé Ben
Laden et indirectement la
création d’Al Qaïda, ils ont suscité
l’émergence du djihadiste,
remis en selle les Talibans en
Afghanistan, bref ils ont semé
le bordel partout dans la
région. Et ils continuent,
toujours avec la même bonne
conscience. Ainsi leur soutien
militaire permanent à Israël
ne peut que jeter de l’huile
sur le feu dans une situation
explosive. Et, de façon plus
générale, ils ridiculisent le
droit international, qu’Israël
ne cesse de bafouer avec leur
bienveillant soutien, et
vident l’ONU de son sens.
Joli
bilan, non ?
2
octobre 2024 :Il se voit déjà

Mon
dernier billet se terminait de
la façon suivante :
« A
quoi rêvent-ils (c’est-à-dire,
vous l’aurez compris,
qu’est-ce qu’ils désirent et
n’ont pas) ? A quoi
rêvent pas exemple Jean-Luc
Mélenchon, Marine Le Pen, Eric
Ciotti, Laurent
Wauquiez , Olivier Faure
et quelques autres. A
vos plumes, ou à vos
claviers ! » Un de
mes lecteurs, Patrick Prévost,
m’a pris au mot, passant
gaiement d’Aznavour à
Mélenchon. Certes, ce n’est
pas du Baudelaire, mais il
faut bien s’amuser de temps en
temps. Voici donc Je me
vois déjà :
Je
me vois déjà en haut de la
liste
Des
présidentielles en sortant
vainqueur le soir du scrutin
Je
me vois déjà détesté des
riches
Et
ancien trotskiste, tirant ma
fierté de fair’ mieux
qu’Jospin
Je
suis le plus grand des grands
politiques
Vénéré
de tous avec mon portrait
brandi dans les rues
Je
me vois déjà faire ma
république
Nommant
mes ministres, signant mes
décrets en maître absolu.
18
septembre 2024 : A
quoi rêvent-ils ?

Je
viens de lire un article
intéressant, portant sur une
banque de données comprenant
16.000 rêves en anglais
d’individus les plus
différents possible. Et
l’analyse de ce corpus montre
que les
mots portable ou téléphone n’y apparaissent quasiment
pas : dans 2% des rêves
seulement.
Les
spécialistes d’onirologie
expliquent cela assez
facilement : nous
rêvons de ce que nous
désirons, de ce qui nous
manque. Par exemple nous ne
rêvons pas de la personne qui
partage notre vie lorsqu’elle
dort à côté de nous, mais
quand elle est absente, en
voyage, ou qu’elle nous a
quittés. Donc nous ne rêvons
pas de nos téléphones
portables parce qu’ils ne nous
quittent jamais, et cela ne
relève plus de l’onirologie
mais des spécialistes de
l’addiction.
Dans
un domaine assez semblable,
j’ai entendu un philosophe
disserter sur l’idée de
bonheur qui, disait-il,
reposait sur un désir :
nous serons heureux quand nous
aurons ce que nous désirons.
Et, une fois la chose désirée
acquise, le désir
disparaitrait et avec lui
l’idée de bonheur. Il prenait
un exemple à la limite de la
provocation : Pour un
chômeur, l’idée de bonheur est
de retrouver du travail. Mais
lorsqu’il en a trouvé, son
idée de bonheur change :
il désire des congés payés
plus longs, une retraite à un
âge moins avancé, etc.
Tout
cela m’a amené à me poser une
question : quelle est
l’idée de bonheur pour ceux
qui vivent de et dans la
politique ? De façon
générale, on peut imaginer
qu’ils rêvent de monter dans
l’échelle des responsabilités.
Un conseiller municipal
rêverait d’être maire, un
maire d’être conseiller
régional, un conseiller
régional d’être député, un
député d’être ministre, un
ministre d’être premier
ministre et un premier
ministre d’être président de
la République. Ensuite ?
Ils faudrait pour en avoir une
idée interroger les psys de
Sarkozy et de Hollande, et
bientôt celui de Macron. A ce
propos, jetez un coup d’œil
sur un gag hilarant d’Obama
lors de la précédente campagne
électorale :
https://youtu.be/aRQLU3lwNYs?si=zl43E1ti5KhvLszn
Mais
revenons à nos moutons. Dans
la situation politique
actuelle de la France, les
choses semblent plus
compliquées. On a d’abord dit
que le premier ministre,
Michel Barnier, et ses
proches, recevaient des
dizaines de propositions,
d’offres de service, de CV,
qu’ils étaient nombreux à
rêver d’être ministre. Et
pourtant, il n’y a toujours
pas de gouvernement et l’on
dit que de plus en plus de
personnes refusent d’être
ministre. Ce qui nous mène à
un paradoxe apparent : ceux
qui rêvent de monter dans
l’échelle des responsabilités
ne veulent pas avoir de trop
lourdes responsabilités. Bref
ils rêvent de monter mais
pas de responsabilités car s’ils ne sont pas à la
hauteur ils risquent de redescendre très vite…
Alors,
pour finir de façon studieuse,
un question à laquelle vous
pouvez consacrer quelques
lignes ou quelques pages. A
quoi rêvent-ils (c’est-à-dire,
vous l’aurez compris,
qu’est-ce qu’ils désirent et
n’ont pas) ? A quoi
rêvent pas exemple Jean-Luc
Mélenchon, Marine Le Pen, Eric
Ciotti, Laurent
Wauquiez , Olivier Faure
et quelques autres.
A
vos plumes, ou à vos
claviers !
12 septembre 2024 : Le
trumpisme, une
religiosité ?
Avant-hier
soir, lors du débat qui
l’opposait à Kamala Harris,
Donald Trump, semblable à
lui-même dans son art du
n’importe quoi, m’a posé une
réelle question.
Commençons
par le corps du délit. Tout
d’abord, avec une précision
géographique digne d’un GPS,
il a raconté que dans une
ville de l’Ohio, Springfield
(il n’a pas précisé dans quel
quartier mais l’aurait fait si
on le lui avait demandé) des
migrants haïtiens mangeaient
des chiens et des chat, ces
gentils animaux domestiques
qu’élèvent les bons
Américains. Un peu plus tard,
alors que K. Harris parlait du
droit des femmes à disposer de
leur corps et des manœuvres de
Trump pour faire interdire
l’IVG, il a dit que les
partisans de l’avortement le
pratiquaient même après la
naissance, c’est-à-dire qu’ils
tuaient des bébés. S’il avait
un minimum de culture, il
aurait pu inventer la formule
d’ avortement post-natal.
Les
deux journalistes qui
animaient le débat lui ont
fait remarquer que ce qu’il
disait était faux, en
particulier que les autorités
de Springfield avaient
démentis cette information.
Mais peu importe. Avant même
la fin du débat les
communicants de Trump ont
annoncé une « performance
magistrale »,
lui-même a prétendu avoir fait
« le meilleur débat de
sa vie »tout en
dénonçant ses
conditions : c’était,
selon lui, « à trois
contre un » puisque
les journalistes contestaient
ce qu’il disait et jamais ce
que disait Harris.
Bref,
il m’a posé une réelle
question. N’importe qui de
moyennant sensé comprend que Trump
aligne des contre-vérités, et
sans doute le sait-il
lui-même. Mais les gens qui le
soutiennent, qui se pâment
devant lui, qui le considèrent
comme un demi-Dieu ? J’en
ai entendu plusieurs
interrogés par des
journalistes : pas de
problème, ils avalent tout.
Quoi
qu’il dise, quoi qu’il fasse,
le socle de ses partisans ne
diminue pas. On a l’impression
qu’il pourrait tuer sa femme
devant tout le monde, sur le
gazon de son golf de Floride,
et que rien ne changerait pour
lui. Même condamné,
emprisonné, ces gens
voteraient quand même pour
lui. Et ma question est toute
simple : comment
qualifier cette naïveté, ou
cette croyance aveugle ?
Imbécillité, mauvaise foi,
stupidité, connerie,
complotisme, débilité
mentale ? Ou encore un mot qui
résumerait peut-être tout
cela : religiosité ?
Mon
problème est qu’à la fois je
présente quelque chose, un
phénomène sociopolitique, et
que je le juge. Ce que, dans
ma position de surplomb, je
considère comme une preuve de
connerie fondamentale, et que,
avec une touche de racisme je
pourrais qualifier de connerie
américaine , est en fait un
comportement que l’on trouve
partout. Ecoutez en France le
électeurs du Rassemblement
National s’extasier sur la
musculature de Jordan Bardella
(oui oui, je ne rigole pas),
ou ceux de la France Insoumise
se pâmer devant les tirades
provocatrices de Jean-Luc
Mélenchon. Vous y voyez une
différence avec les partisans
de Trump ?
Bref,
on se sent un peu démunis face
à la force grandissante des
réseaux sociaux, face aux
tsunamis de fake news, face au
mensonge considéré comme une
« vérité
alternative » et donc
comme un type d’information.
Face
à cette religiosité des
partisans de Trump, de
Mélenchon, de Poutine, de qui
vous voudrez, il faudrait
peut-être dès l’école primaire
expliquer aux enfants comment
analyser, vérifier, critiquer
ce qu’on leur raconte. Mais,
et c’est un autre problème,
cela n’impliquerait-il pas
qu’on leur explique comme
critiquer, analyser, vérifier,
ce que racontent leurs
parents.
Et
voilà que je me retrouve en
position de surplomb.
11 septembre 2024 : Aller à la soupe
Pendant
ces deux mois de gouvernement
expédiant les affaires
courantes et que Macron
déclarait haut et fort qu’il
travaillait « jour et
nuit » à trouver une
solution, les couloirs du
pouvoir bruissaient
d’intrigues divers. Certains,
comme Xavier Bertrand, ne
cachaient pas leur envie
d’être premier ministre.
D’autres, comme l’inénarrable
Ségolène Royal, donnaient même
les noms des membres de leur
futur gouvernement. D’autres
enfin agissait dans l’ombre
comme, si j’en crois certains
bruits, celui qui l’emporta
finalement, Michel Barnier.
Nous
en sommes au second round,
celui du choix des ministres.
Là aussi, ça s’agite dans le
Landernau politique. Un seul,
Bruno Le Maire, a déclaré sans
ambiguïtés qu’il ne resterait
pas au gouvernement et
cherchait un poste dans
l’enseignement. Certains,
comme Gérald Darmanin, Rachida
Dati ou Sébastien Lecornu,
déclarent à qui veut les
entendre que si la France a
besoin d’eux, ils resteraient
bien sûr au service du bien
public. D’autres, plus
discrets, écrivent au
Président ou à ses proches
pour dirent qu’ils sont
disponibles, au cas où…
Passons
au troisième round, celui des
élections législatives qui
auront très certainement lieu
dès que, dans dix mois, le
Président pourra dissoudre
l’assemblée. Ici, ce sont les
députés qui sont en jeu et qui
pensent déjà à concerner à
tout prix leur siège.
L’exemple le plus voyant est
celui d’Olivier Faure, patron
du PS. Réélu député grâce à
l’aide de La France insoumise,
il refuse la moindre
indépendance de son parti et
se garde bien de critiquer
Mélenchon. Son avenir
personnel passe avant toute
réflexion politique sur
l’avenir de la gauche.
Ce
qui frappe le plus c’est que,
derrière ces candidatures
ostentatoires ou plus
discrètes, il n’y a pas
l’ombre d’un début de
programme. Etre ministre, mais
pour quoi faire ? Pour
appliquer quelle
politique ? Pas un mot
sur ce point. Redevenir
député, mais pour défendre
quelle politique? Nul ne le
dit. On a ainsi l’impression
que tous courent après un
ministère, un poste, un siège,
pour le seul souci de leur
propre avenir.
Cela
s’appelle aller à la soupe.
Bon
appétit.
4
septembre 2024: L'enfant
roi
Légèreté ?
Inconscience ?
Désinvolture ?
Imprudence ? On ne sait
comment qualifier Macron,
alors qu’il se débat dans le
bourbier qu’il a lui-même
suscité. L’affichage de sa
volonté de trouver pour
Matignon quelqu’un capable de
-mais de quoi ?- n’est
qu’un faux semblant. Il ne
cherche pas un premier
ministre acceptable par
l’Assemblée nationale ou par
les Français, mais quelqu’un
qui ne mette pas en question
la politique que lui, Macron,
a menée, qu’il a décidée et
sur laquelle il ne veut pas
revenir. Incapable de la
moindre autocritique, de
l’idée qu’il a pu avoir tort,
incapable de comprendre qu’il
est rejeté par tout le monde
parce qu’il a sans cesse
confondu les rôles, qu’il
s’est voulu à la fois
président, premier ministre,
ministre de la santé,
porte-parole du gouvernement,
etc. etc., il est comme
l’archétype de l’enfant roi.
Je ne sais pas par qui ni
comment il a été élevé, mais
le résultat est là. Certes il
ne hurle pas en public, il ne
tape pas du pied, il ne claque
pas les portes, mais il est un
gamin qui pense avoir toujours
raison et n’admet pas qu’on en
doute.
Dans
son rêve de royauté, il
n’explique rien à personne.
Tout le monde se demande
pourquoi la France n’a pas
encore de gouvernements. Il
semble s’en foutre. La
majorité des économistes
disent que le pays est au bord
de la faillite, que la dette
est énorme. Il n’en dit mot.
Il voulait casser le système
des partis, et les partis lui
reviennent en pleine gueule,
avec leurs petits calculs
politiciens et la même
irresponsabilité. Mais il
semble ne pas le voir. Et ces
partis nous mentent et se
mentent. Ils parlent
d’augmentation du Smig, de
baisse des prix, alors que les
impôts ne peuvent qu’augmenter
et le niveau de vie baisser.
Situation lunaire, disent
certains.
Ce
qui est sûr, c’est que Macron avait
eu, après sa première
élection, une formule
caractéristique, se présentant
comme le « maitre des
horloges », mais
qu’aujourd’hui il ne peut même
plus s’accrocher aux aiguilles
de l’horloge. Il
ne le sait pas, ou ne veut pas
le voir, mais il tombera tôt
ou tard. Plus dure sera la
chute, la chute d’Icare ou
d’Icare ou de Jupiter. Nous
sommes à la fin du règne
macronien et il semble ne pas
le comprendre.
Ses
amis, s’il en a, devraient se
préoccuper de lui trouver un
bon pédopsychiatre .
31
Août 2024: ПУТЛЕР et lectures plurielle
s
Je
suis tombé, dans le journal Le
Monde de ce samedi sur
une photo sur laquelle on lit ПУТЛЕР.
Si vous ne lisez pas le
cyrillique, cela se prononce
« poutler », ce qui
ne signifie rien en russe.
Cependant le regard, en
montant au-dessus de ce mot,
voit une photo bizarre, mais
comprend très vite qu’il
s’agit du visage de Poutine
affublé de la mèche et de la
moustache d’Hitler. Et le mot ПУТЛЕР prend
alors tout son sens :
Pout(ine Hi)tler. On lit
dessous « ton chaudron
est déjà chaud » !
L’enfer t’attend »). « Ton », « t’ » : le texte s’adresse à une
seule personne, représentée
par une photo composite et par
un mot valise. Ce genre de
message que l’on ne peut
décoder que par un va-et-vient
entre différents systèmes,
même si l’exemple ci-dessus
est simple, souligne cependant
la complexité de la
communication, que la
linguistique a parfois
tendance à évacuer.
Nous
pouvons imaginer différents
exercices pratiques. Cherchez
par exemple sur Internet une
photo des représentants du
Nouveau Front Populaire à la
sortie de la rencontre avec
Macron et analysez la place et
l’origine des différentes
personnes. Ou encore cherchez
une photo de la réunion à
l’Elysée au cours de laquelle
Macron annonce la dissolution
et analysez la mimique d’Attal
et de Darmanin, et ensuite une
photo du même Darmanin sortant
de l’Elysée et enlevant sa
cravate. Autre idée :
prenez toutes le déclarations
des différents acteurs
politiques (« nous avons
gagné », « nous
sommes le premier
parti », « nous
avons le plus de
députés », etc.), notez
les sur des bouts de papier et
demandez à qui vous voulez qui
a dit quoi.
Bref,
c’était juste pour se détendre
avant la rentrée scolaire.
28
Août 2024: Assassins!
Obsédé
par l’élection présidentielle
et pour des raisons évidemment
électorales, Mélenchon est
depuis des années d’une grande
complaisance envers
l’islamisme et le
communautarisme. Cela l’a bien
sûr mené, après le 7 octobre
2024, à refuser obstinément de
considérer l’attaque du Hamas
comme terroriste. La gauche,
en particulier le PS,
paralysée par la crainte de
perdre des sièges aux futures
législatives sans le soutien
des insoumis, se tait. Ou, du
bout des lèvres, concède que
oui, bien sûr, le Hamas, etc.,
mais le Hamas, etc.
Je
sais que certains considèrent
les combattants du Hamas comme
des résistants, mais les
résistants s’attaquent à
l’armée du pays oppresseur, et tuer,
voire violer, des
civils, hommes, femmes,
enfants, n’ est pas un acte de
résistance, c’est du
terrorisme.
De
l’autre bord on essaie tout
aussi obstinément de nous
faire croire que critiquer la
politique de l ‘état d’Israël est
une preuve d’antisémitisme. Et
cette ruse de la raison
fonctionne à plein régime. Or
il n’y a aucune raison de ne
pas considérer Israël comme
tout autre pays. Critiquer la
tentative d’invasion de
l’Ukraine par les armées de
Poutine n’est pas un racisme
anti Russes, critique la
politique de la France en
Nouvelle Calédonie n’est pas
un racisme anti Français. Le
gouvernement israélien envoie
son armée massacrer des
dizaines de milliers de civils
dans la bande de Gaza, et
c’est aussi une forme de
terrorisme. Crier « Hamas
assassin » n’est pas une
prise de position contre les
Palestiniens, au
contraire : le Hamas fait
obstacle à la solution de deux
pays, il veut simplement faire
disparaître Israël. Et crier
« Israël assassin »
n’est pas une crise de
position comme le peuple
israélien, ou contre les
Juifs, c’est qualifier la
politique d’un Etat.
« Mal
nommer les
choses, c'est
ajouter au malheur de
ce monde », écrivait Camus. Ne pas dire qu’Israël est un Etat voyou, qui ne
respecte aucune loi
internationale, aucune
résolution de l’ONU,
qui occupe de plus en
plus de territoires
palestiniens et massacre des
civils, ne pas dire que le
Hamas est composé
d’illuminés fanatisés qui se
foutent du sort des
Palestiniens et d’une
solution politique, tout
cela brouille les cartes.
Livrer des armes à Israël
comme le font les USA,
financer et armer le Hamas
comme le fait le Qatar avec
la complicité de Netanyahou,
c’est ajouter au malheur de
peuples en finançant leurs
assassins .
Alors,
oui,
Israël et Hamas
assassins !
16
Août 2024: "Bilans"...
Macron,
qui s’est récemment plusieurs
planté dans ses paris
(élections européennes,
élections législatives…) a
cependant pour une fois fait
preuve de perspicacité en
annonçant (ou espérant, ou
ordonnant…) que la France
serait parmi les cinq
premières nations aux Jeux
olympiques et qu’elle aurait
au moins 60 médailles. Les
résultats, 64 médailles dont
16 en or, lui ont donné
raison. Il est vrai quelques
disciplines nouvelles
(breaking, kite-foil) dont
l’avenir aux JO n’est
d’ailleurs pas assuré,
semblaient taillées sur mesure
pour notre pays. Mais il est
moins sûr que la perspicacité
du président se
poursuive : la trêve
olympique a peut-être entraîné
une trêve politique, mais les
affaires publiques restent
confrontées aux mêmes
problèmes.
Nous
pouvons jeter différents
regards sur les résultats. Le
classement final, pour les 5
premiers pays, est le
suivant : USA, Chine,
Japon, Australie, France. Ce
classement repose sur le
nombre de médailles d’or, et
si l’on prenait en compte
l’ensemble des médailles, il
serait un peu différent: USA
(126), Chine (91), France
(64), Australie (53) et Japon
(45). Mais ce qui me frappe le
plus c’est qu’il n’y a pas de
corrélation entre ces
résultats et la population des
pays concernés : les USA
comptent 333 millions
d’habitants, la Chine 1,412
milliard, le Japon 125
millions, l’Australie 26
millions et la France 67
millions. Le pays le plus
peuplé, la Chine, est derrière
les USA, et le moins peuplé,
l’Australie, et dans le top 5.
C’est donc sans doute la
politique sportive de ces pays
qu’il faudrait examiner, et la
différence entre le sport
d’élite et le sport de masse.
Par exemple si la France a
connu une réelle réussite, et
si cette réussite suscite des
ambitions chez les jeunes,
a-t-elle les infrastructures
et les formateurs suffisants
pour répondre à ces
ambitions ? Le sport,
d’élite comme de masse, est à
l’évidence à la fois une
question politique et une
question budgétaire…
Un
autre regard concerne les
« partenaires »
ou les
« sponsors » des
JO, c’est-à-dire les marques
qui ont mis de l’argent dans
cet événement. Elles ont été
outrageusement visibles,
surtout LVMH, et près d’une
semaine après la fin des JO
certaines (Allianz,
LVMH, Décathlon…) continuent
de faire une pub rétroactive
sur toutes les chaînes de
télévision en rappelant leur
soutien financier. Nous
savions déjà que le sport
était de plus en plus une
affaire de fric, ceux qui en
doutaient ne le peuvent plus.
Mais
ce « bilan » partiel
et peut-être partial ne change
rien à la question qui se
posait il y a trois
semaines : quel
gouvernement pour la
France ? Macron doit
peut-être écouter en boucle la
chanson que Gilbert Bécaud
avait composé sur le rythme du Boléro de Ravel : Et maintenant, que vais-je
faire….
6
Août 2024: Jean-Luc
Pidoux-Payot
L’éditeur
Jean-Luc Pidoux-Payot vient de mourir à
l’âge de 90 ans. Prenant tout
jeune, en 1960, la
suite
de son oncle Gustave Payot il
avait fait de cette maison
d’origine suisse, qui avait
publié le Cours le
linguistique générale de
Ferdinand de Saussure, une
sorte de temple des sciences
humaines, publiant Freud,
Einstein, Adorno, Dumézil,
confiant la direction de
collections prestigieuses à
Roger Dadoun, Marc Ferro,
Miguel Abensour, Laure Adler…
Je l’avais connu en 1964, et
j’avais d’abord traduit pour
lui quelques livres de
l’anglais, de l’italien ou de
l’espagnol. Puis il publia mes
premiers livres (une dizaine),
me fit rejoindre le comité de
lecture et me confia la
direction d’une collection
consacrée à la linguistique et
la sémiologie (Langage et
Société). Avec lui,
j’apprenais sans cesse :
comment expliquer aux
candidats auteurs qu’une thèse
n’était jamais un bon livre, comment en discutant
avec eux leur faire découvrir
quel livre il pouvait écrire,
mais aussi qu’on
discutait avec eux de façon
plus efficace autour d’une
table de restaurant que dans
un bureau… C’est grâce à lui
que j’ai pu lancer de jeunes
auteur comme Marina Yaguello,
Christian Cuxac, Nancy Huston,
Sylvain Auroux, Jean-Didier
Urbain, mais aussi publier des
auteurs reconnus qui me
faisaient confiance, comme
Pierre Guiraud, André
Martinet, Maurice Swadesh,
Ivan Fonagy…
Au
début des années 1980, devenu
président du syndicat des
éditeurs, c’est lui qui, avec
Jack Lang, alors ministre de
la culture, initia la loi sur
le prix unique du livre.
Editeur reconnu, il fuyait la
lumière, les médias, tout en
discrétion, en humilité.
Lorsqu’en 1986, le groupe
suisse Edipresse
(la famille Lamunière) racheta
Payot et le licencia, par
fidélité et aussi par sens
moral je le suivi chez Plon,
où il eut la joie de retrouver
un auteur dont il avait été l’
élève des années auparavant,
Claude Levi-Strauss. Un peu
plus tard j’avais joué les
entremetteurs pour qu’il
revienne aux éditions Payot,
où je l’avais suivi à nouveau.
Puis
ce fut la retraite. Je le
voyais lorsque je venais à
Paris, dormais chez lui
parfois. Nous allions ensemble
aux meetings de Ségolène
Royal, de François Hollande,
mangions parfois avec
d’anciens auteurs. Ces derniers
années il était entré dans une
nuit cognitive, qui s’est
achevé il y a deux jours.
Salut
Jean-Luc.
4
Août 2024:
Délinquants et procureurs
Depuis
le retrait de Joe Biden, la
campagne présidentielle
américaine a changé de genre.
Donald Trump, avec ses 78 ans,
est désormais le vieux face
aux 59 ans de Kamala Harris.
Et surtout, il
traîne derrière lui pas mal
d’accusations et de procès, et
se trouve désormais face à l’
ancienne procureure générale
de Californie. Si quelqu’un
avait l’idée de faire un
jour un film sur cette
campagne, il pourrait
l’intituler Le délinquant
et la procureure.
Un
autre qui pourrait se trouver
devant un procureur et fait
tout et le pire pour l’éviter,
c’est Benjamin Netanyahou. Son
dernier « coup », dont
on parle peu, concerne
l’archéologie. Je sais, nous
sommes loin des massacres dans
la bande de Gaza, mais… Un
texte signé par des dizaines
d’archéologues et publié jeudi
dans Libération lève
le voile sur une manipulation
de la science. En bref, le
parlement israélien vient
d’adopter un projet classant
la totalité des sites
archéologiques de Cisjordanie
sous la responsabilité de
l’Etat israélien, prétendant
que ces sites seraient « le
berceau de la nation
hébraïque ». Ces
sites, plus de 7.000, se
trouvent tous en territoire
palestinien dans lequel les
colons s’installent
illégalement depuis des
années. Mais surtout, le but
de l’opération est
double : d’une
part contrôler la recherche,
instrumentaliser l’archéologie
à des fins politiques et
d’autre part continuer à
annexer des morceaux de
Cisjordanie.
Une
« petite »
précision : parmi ceux
qui ont protesté contre ce
projet législatif se trouvent
la Society for Palestinian
Archeology et l’Israeli
Archeology Association.
29
juillet 2024: Notes
olympiques
En
ces temps de chaleur et de
Jeux olympiques on peut, sur
la portée de l’observateur,
poser quelques notes. Les
premières concernent la
cérémonie d’ouverture,
ébouriffante, désarçonnante, bref
on a tout dit et plus encore
sur ce spectacle. En revanche,
il est intéressant de noter
les réactions de la droite et
de l’extrême droite,
globalement négatives. Pour
Michel Onfray il s’agissait
d’un « Disneyland
wokiste kitsch » et
pour Philippe de Villiers
« Nous avons acté
devant le monde entier le
suicide de la France »,
et il en rajoute, « Tout
était laid, tout était woke ».
Bigre ! Du côté du
Rassemblement national, les
critères ont fusé. « Une
honte, un saccage pour la
culture française »,
« Une humiliation du
peuple français ».
Arrêtons ces notes, la mélodie
est cacophonique. Mais
lorsqu’on a aimé ce que ces
gens-là n’aiment pas, on est
sûr de ne pas se tromper.
Toujours
aux JO, un judoka algérien,
Messaoud Redouane Driss, a été
retiré du tableau des moins de
73 kilos, accusant sur la
balance 400 grammes de trop.
En fait il devait affronter un
judoka israélien, qui du coup
a été qualifié pour
le tour suivant. On peut
analyser l’incident de
plusieurs façons. Ecartons
l’idée qu’il avait trop mangé
la veille. L’explication la
plus sûre est que tous les
sportifs algériens (et ceux
d’autres pays) ont pour
consigne de ne pas rencontrer
de sportifs israéliens, de ne
pas avoir à les saluer ou à
leur serrer la main. Mais,
n’en n’ayant aucune preuve,
nous pouvons aussi avancer
malicieusement que Driss
voulait éviter la honte
suprême, être battu par un
juif. Mais certains, bien sûr,
pourront applaudir ce courage,
cette détermination politique
ou ce racisme….
Hors
des JO maintenant, mais en
même temps qu’eux, au
Venezuela Nicolas Maduro a été
réélu président de la
République avec 51,2% des
suffrages. Tous les sondages
l’annonçaient largement battu.
Bien sûr, les sondages peuvent
se tromper, nous l’avons vu
aux récentes élections
législatives françaises. Mais
là, à part quelques pays,
Chine, Cuba, Nicaragua, Russie,
une grande partie de la
communauté internationale a
exprimé ses doutes sur la
sincérité du scrutin.
Depuis
2015, sept millions de
vénézuéliens ont quitté leur
pays, où 30%
de la population vit sous le
seuil de pauvreté et où
l’inflation a augmenté en
2023de 360% par rapport à
l’année précédente. Une série
de records olympiques !
Il
n’y a pas très longtemps, en
2017, Jean-Luc Mélenchon
proposait dans le chapitre 62
de son programme présidentiel
de "Rejoindre les
coopérations régionales dans
une démarche de
codéveloppement écologique,
social et de progrès
humain : par exemple
l'Alba (Alliance
bolivarienne pour les
peuples de notre Amérique)
", alliance créée par
Hugo Chavez, alors président
du Venezuela, et Fidel Castro.
En 2017, l’Iran et la Syrie en
étaient pays observateurs, et
en 2019 la Russie avait été
invitée au sommet de l’Alba…
Si
Mélenchon, tout peut arriver,
prenait sa retraite politique,
irait-il la passer au
Venezuela ?
20
juillet 2024: Dimoqrâtiya
/dîmakrâtie
Je
viens de passer une dizaine de
jours en Tunisie où j’ai fait,
comme d’habitude, provision de
soleil, de souvenirs
d’adolescence, de salade de
poulpe, de mer et d’huile
d’olive. Mais, la nostalgie
n’étant plus ce qu’elle était,
j’ai aussi les yeux ouverts
sur le présent. Depuis 2011 et
ce qu’on a appelé la
« révolution de
jasmin », le mot démocratie a parcouru un
arc-en-ciel sémantique
intéressant. Au début la dimoqrâtiya c’était
la nouveauté, la licence de
dire ou de faire ce que l’on
voulait, en bref la liberté.
Les régimes politiques qui se
sont succédés ont vite dévalué
le mot qui est aujourd’hui la
cause de tous les maux.
« Et oui, c’est la dimoqrâtiya »
dit-on
d’un air résigné face à ce qui
désole ou ne marche pas,
c’est-à-dire presque tout. La dimoqrâtiya n’est
plus un espoir ou une liberté
mais un échec, ou du moins
l’explication populiste de
tout ce qui va mal.
L’humoriste
algérien Fellag prononçait
dans un de ses sketches ce mot
grec acclimaté en arabe, dimoqrâtiya, d’une façon qui en changeait le sens, dîmakrâtie : en
gros « toujours de
chaises ».
Comprenez : le règne de
ceux qui veulent conserver
leur siège. Ce qui n’est pas
mal vu et pourrait s’appliquer
à d’autres pays que ceux du
Maghreb.
Ce
type d’étymologie populaire me
fait toujours penser à celle,
fausse bien sûr mais
réjouissante, de parlement : on
y parle et on y ment.
1er
juillet 2024: La honte et
la haine

Cela
peut paraître un peu convenu,
mais je l’écris, ou le crie
quand même : après ce
premier tour des élections
législatives, j’ai honte de la France. Honte des gens que je croise au gré
de mes déplacements, dans la
rue, au bistrot, sur le
marché, dont statistiquement 1
sur 3 a voté pour le
Rassemblement National. Bien
sûr nous y verrons plus clair
demain soir, après la clôture
des candidatures pour le
second tour, nous saurons si
les consignes de désistement
sont suivies d’effet. Et, sur
ce point, il nous faut encore
parler de Mélenchon. Il a été
le premier à appeler au
désistement pour faire barrage
au Rassemblement Nationale,
étant pour une fois très
clair. Mais personne à ma
connaissance ne s’est
interrogé sur son statut.
Entouré par deux ou trois de
ses sbires, dont une femme
portant un keffieh
palestinien, il
parlait en « nous ».
Qui ça,
« nous » ? La
gauche unie ? Les
insoumis ? Par qui
était-il mandaté ? Son
intervention était bienvenue,
mais comme d’habitude lui-même
était ambigu. N’ayant
participé à aucune des
réunions du « Nouveau
front populaire », étant
révoqué par beaucoup de des
créateurs, il ne voulait pas
être absent, il voulait encore
être au centre.
De
toute façon je ne crois pas
(je peux bien sûr me tromper,
mais je ne crois pas) que le
RN aura une majorité absolue.
Ce qui ne change d’ailleurs
rien: j’ai honte.
Certains commentateurs parlent
de vote de colère et non pas
d’adhésion. Cela ne changerait
pas grand-chose, mais je n’y
crois pas non plus. Il s’agit
bien d’un vote d’adhésion, non
pas au programme du RN, dont
tout le monde sait qu’il n’est
pas applicable, mais
d’adhésion à tous les non-dits
du RN, à ce que ses dirigeants
tentent depuis des années de
gommer, de masquer. Ses
origines pétainistes, ses
liens avec l’OAS, son racisme
tripal, sa haine de
l’autre, de l’étranger, de
l émigré, de
l’homosexuel, de qui sais-je
encore : sa haine.
Les sondeurs ont longtemps
considéré que dans leurs
enquêtes d’opinion le vote
pour le Front National était
sous-estimé car caché,
inavoué, et qu’il fallait
corriger à la hausse les
déclarations des sondés et
donc les prévisions. Depuis
des semaines, au contraire, il
se passe ce qu’on appelle en
psychanalyse une
décompensation, lorsqu’une
structure psychique se
déséquilibre et que des
syndromes jusque-là enfouis
apparaissent au grand jour.
Lorsque par exemple une
pulsion suicidaire latente
débouche sur un suicide réel.
Depuis des semaines donc, des
journalistes d’origine
maghrébine ou africaine
reçoivent quotidiennement des
dizaines de mails racistes, on
entend des injures à tous les
coins de rue, bougnoule,
bicot, sale nègre, pédé, il y
a des passages à tabac, des
viols… Les gens ne cachent
plus leurs sentiments
profonds, leurs pensées
dégueulasses, leurs haines…
Le RN les a décomplexés et le
résultat n’est pas beau à voir
ou à entendre. La haine humilie
celui qui la porte,
l’enlaidit, le rend moche.
Mais ce qui importe, c’est
qu’ils n’en ont plus honte.
Freud considérait la
décompensation comme "une
tentative des êtres à
trouver des solutions -
certes dysfonctionnelles - à
des problèmes profondément
humains".
Si cela était, c’est de
l’humanité elle-même qu’il
faudrait avoir honte,
c’est elle qu’il faudrait haïr.
Ce qui n’est guère
réconfortant…
28
juin 2024: Avant de
voter
Tout d’abord un petit sourire. Jordan Bardella
a annoncé un projet : les
Français binationaux seraient
exclus des postes
« sensibles » dans
la haute administration. En
bref il les considèrent comme
des traitres ou des espions
potentiels. Or, lui a rappelé
Gabriel Attal lors d’un débat, il
a au parlement européen une
conseillère, Tamara Volokhova,
qui le « représente à la
commission des affaires
étrangères sur les questions
de sécurité et de défense (…)
assiste des des réunions à
huis clos avec des
informations confidentielles
sur la guerre en
Ukraine ». Et
alors ? Alors, madame
Volokhova est binationale,
elle a bien sûr un passeport
français mais aussi un
passeport russe. Cherchez
l’erreur…
Et puis un petit poème de Bertolt Brecht que
vous connaissez sûrement, mais
les piqûres de rappel ne font
jamais de mal :
« Quand
ils sont venus chercher les
communistes,
je n'ai rien dit.
je n'étais pas communiste
Quand ils sont venus chercher
les syndicalistes,
je n'ai rien dit.
je n'étais pas
syndicaliste
Quand ils sont venus chercher
les juifs,
je n'ai rien dit.
je n'étais pas juif
Quand ils sont venus chercher
les catholiques,
je n'ai rien dit.
je n'étais pas catholique
Et, puis ils sont venus me
chercher.
Et il ne restait plus personne
pour protester ».
Allez,
bon vote…
21
juin 2024: Pouvoir
de nuisance
L’union de la gauche, après la dissolution
suicidaire de l’Assemblée
nationale par Macron, a donné
de l’espoir à beaucoup de
gens, dont moi. Nous avions
l’impression que Mélenchon
était mis sur la touche, qu’il
allait enfin fermer sa gueule.
C’était compter sans son
pouvoir de nuisance. Déjà,
pendant la campagne
européenne, il avait accumulé
les dérapages, déclarant qu’il
y avait en France un
« antisémitisme
résiduel » alors qu’il
est le meilleur exemple du
contraire : disant du
député Jérôme Guedj qu’il s’agit[ait] autour
du piquet où le retient la
laisse de ses
adhésions » ou agressant sans cesse
Raphael Glucksmann. Une fois
l’union annoncée, il a
immédiatement trahi le
principe affirmé que les
députés sortant seraient
reconduits en effectuant une
véritable
purge stalinienne:
rejetant les députés LFI qui
avaient eu l’audace de le
critiquer et reconduisant en
revanche un de ses proches,
Adrien Quatrenens, condamné
pour violence conjugale, qui
devant les protestations a eu,
lui, la décence de se retirer.
En
fait, on a l’impression qu’on
ne peut pas faire confiance à
LFI, du moins à ceux de ses
membres qui suivent
aveuglement leur gourou,
qu’ils voudront à tous prix
conserver une hégémonie sur la
gauche unie. Regardez les
photos ou les films sur
lesquels Mélenchon est entouré
de ses plus proches : Mathilde
Panot
fait penser à une bonne-sœur
en extase devant le dieu
vivant et Manuel Bompard a des
airs de garde du corps prêt à
flinguer tout ce qui bouge. Et
tout se passe comme si Mélenchon
voulait
absolument contrecarrer cette
union et qu’il utilisait pour
cela son pouvoir de nuisance.
J’ai entendu hier le journaliste Patrick Cohen
dire que plus
les insoumis bordélisent, plus
le RN se normalise ». Et
c’est peut-être ce que cherche
Mélenchon. Plus il parle et
plus il apporte des vois à
l’extrême droite.
Bon, cela ne m’empêchera pas de voter, le 30
juin, pour le Nouveau Front
Populaire, mais il faudra bien
arriver un jour à se
débarasser de ces boutefeux
qui veulent tout sauf arriver
au pouvoir par les urnes.
14
juin 2024: Pour rire un
peu

Par
les temps qui courent dans la
vie politique française, on a
parfois envie de rire un peu,
histoire peut-être de ne pas
pleurer. Alors voici quelques
occasions de rire ou de
sourire…
Un ami, rentrant d’un colloque en Allemagne, à
Wuppertal, me dit qu’il y
avait sur le lieu de travail
deux portes de toilette. On
pouvait lire sur la première Ohne pissoir (« sans
pissotière ») et sur la
seconde Mit
pissoir (« avec
pissotière »). On aurait
bien sûr pu imaginer quelque
chose comme pisse debout et pisse assise, mais cela
aurait été plus vulgaire. Dans
les deux cas, cependant, il
s’agit bien sûr d’éviter
« hommes » et
« femmes » ou les
pictogrammes ayant le même
sens. Il faudrait en effet,
selon certains, ne parler que
de personnes. Wokisme,
quand tu nous tiens…
Autre chose qui m’a fait sourire. Dans mon
précédent billet, j’écrivais
en riant à moitié que j’allais
demander l’asile politique, au
Brésil, et j’ajoutais :
« Mais
y voudra-t-on de
moi ? ». Voici la
réponse que j’ai reçue d’une
amie brésilienne : « Tu
seras
très bien accueilli ici en
tant qu' oiseau gauchiste
migrateur. Il faut profiter la
brise démocratique sur le
Brésil, mais je ne sais pas si
elle va durer longtemps, tu
sais, avec le réchauffement de
l' imbécilité de la
planète... » Oiseau gauchiste
migrateur, réchauffement
de l’imbécillité de la
planète… Elle a du
style et de l’humour, ma
copine.
Enfin,
mais faut-il en rire ou en
pleurer, une histoire de
bouffon. Nous savions depuis
longtemps qu’Eric Ciotti,
président du parti Les
Républicains, avait une
idéologies très proche de
celle du Rassemblement
national. Il a franchi le pas
en annonçant que LR allait
signer un accord avec le RN.
Un parti se réclamant de De
Gaulle s’alliant avec un autre
descendant des fascistes de
l’OAS, cela avait de quoi
surprendre. Mais, patatras, le
bureau national de
LR décide à l’unanimité de
l’exclure. En fait, Ciotti se
sentant menacé à Nice,
craignant de ne pas être réélu
s’il y a en face de lui un
candidat du RN, a passé un
accord à son seul profit.
Cela donne une
triste idée de la politique.
Mais ce qui est drôle est à
venir. Ciotti, voulant montrer
qu’il était toujours aux
commandes de son parti, a
publié une vidéo dans laquelle
on le voit, l’air très digne,
s’installer dans son fauteuil,
sortir son téléphone et le
poser sur son bureau… Mais il
ne s’y trouve rien d’autre, ni
dossiers, ni ordinateur :
on lui a tout enlevé. Du coup,
Ciotti se ridiculise tout
seul. On pense à un sale
gosse colérique qui ne veut
pas partager ses jouets, à
un gamin qui veut voler le
gâteau de sa petite sœur… Je
suis dans mon bureau, c’est
à moi, j’y reste !
Bref, je ne sais pas comment
cela va se terminer, mais
nous sommes en pleine
bouffonnerie.
10
juin 2024: A quelle
roulette joue le
président?
Dégoût, honte, rage ? Je ne sais quels
mots utiliser pour exprimer
mes sentiments face à ce pays,
le mien, qui est en train de
virer à l’extrême droite. Si
cela s’avérait, je pourrais
choisir l’exil politique. Vers
la Tunisie, mon pays
natal ? Le régime actuel
n’est guère attirant. Plutôt
vers le Brésil. Mais y
voudra-t-on de moi ?
Bon, restons sérieux. La dissolution de
l’Assemblée Nationale que
vient de décréter Emmanuel
Macron a étonné, à juste
titre, bien des gens. A quoi
peut-il bien penser ?
Croit-il qu’en allant aux
urnes comme en 2022 il
obtiendra la victoire ?
Pari plus que risqué, qui
s’apparenterait à sauter du
haut de la tour Eiffel pour
voir si l’on sait voler.
Croit-il que se produira un
réflexe républicain, que les
différents partis se
désisteront les uns pour les
autres au second tour afin de
faire barrage à l’extrême
droite ? Coup de poker un
peu osé. Ou encore, de façon
plus perverse, pense-t-il
qu’en cas de cohabitation
l’extrême droite au
gouvernement ferait très vite
la preuve de son incompétence,
et qu’il pourrait, un an après
(c’est le délai légal)
dissoudre à nouveau
l’Assemblée ? Bien sûr,
je n’en sais rien. Mais tout
cela ressemble à la roulette
russe. Vous connaissez ?
On prend un révolver avec un
barillet contenant six trous
dans lesquels on peut mettre
six balles. On n’en met
qu’une, on fait tourner le
barillet et, le canon contre
sa tempe, on appuie sur la
gâchette. En fait cette
roulette russe est truquée car
en faisant tourner le barillet
la balle unique, par son
poids, va s’arrêter en bas et
non pas en face du canon.
Donc, aucune chance de se
tuer. Une plaisanterie raciste
parle de roulette belge, avec six
balles dans le barillet et
donc aucune chance de
survivre. A quelle roulette
Macron joue-t-il ? Je
n’en sais rien non plus.
Une autre question est de savoir ce que va
faire la gauche. Se réunir,
socialistes, insoumis et
écologistes ? Les
insoumis ne rêvent que de ça.
Mais je crois que cela ne
serait possible que s’ils se
débarrassaient de Mélenchon.
Certains y pensent, mais ils sont rares, le
réflexe grégaire est sans
doute le plus probable, et
Mélenchon ne cherche que le
désordre, un désordre d’où,
selon lui, jaillirait la révolte puis la
révolution. D’autres parlent
d’un front populaire dans
lequel les insoumis seraient
les bienvenus. A condition,
bien sûr, que ce soit sur un
autre programme que le leur, à
discuter.
Là aussi, je ne sais pas aujourd’hui ce qui
pourrait advenir. J’ai
tendance à penser qu’un
problème dont on ne trouve pas
la solution est un problème
mal posé. Alors, si vous voyez
une autre façon de le poser…
6 juin 2024: Jeu de massacre

Pour les élections européennes de dimanche
nous aurons en
France le choix entre 38
listes. Oui, vous avez bien
lu, 38. Vous pouvez analyser
cette foultitude comme il vous
plaira : démocratie
vivante, diversité salutaire,
fourre-tout, bal des égos,
etc. Ou vous dire que nous
avons bien de la chance :
les Chinois ou les Russes
n’ont pas droit à cette
liberté d’opinions.
Il n’empêche que cette « liberté
d’opinions » donne lieu à
un curieux mélange. Dans les
affiches ou les slogans des
différentes listes, trois mots
dominent. Sans surprise, Europe apparaît dans la
publicité de neuf des listes,
suivie par France ou française (cinq fois)
et écologie (quatre
fois). Mais ces mots ne
semblent pas toujours vouloir
dire la même chose. Ainsi pour
Europe : on va de Réveiller
l’Europe (Glucksmann)
ou Besoin d’Europe (parti
macroniste) à L’Europe ça
suffit (Florian
Philippot). Quant à la France (ou l’adjectif française),
de façon surprenante, on les
trouve une fois à l’extrême
gauche (La France Insoumise),
quatre fois à l’extrême droite
(Marion Maréchal, Jordan
Bardella, Lalanne-Dieudonné,
Patrice Grudé), et une fois à droite
(Bellamy) . Et Ecologie est interprété, comme
toujours, de différentes
façons. S’y ajoutent des
listes aux intitulés un peu
étonnants, en tout cas dont on
voit mal le lien avec le
projet européen : Free
Palestine (liste de
l’union des démocrates
musulmans français), Parti
animaliste (avec sur
l’affiche un chat très mignon
mais dont on ne distingue pas
les opinions politiques) et Parti
pirate (dont le but,
selon leur site, est de construire
une base démocratique solide
pour l'Union. On peut
difficilement être contre).
Ajoutons-y le site Espéranto
langue commune,
dont le projet est clair, et
des sites outrageusement
égotistes, comme la liste
Asselineau-frexit, du nom de
sa tête de liste, François
Asselineau, inspecteur des
finances aux discours assez
prétentieux qui a obtenu à la
présidentielle de 2017 0,92%
des vois et n’a pas pu se
présenter en 2022, faute de
parrainages suffisants, ou la
liste Marion la France
fière…
On est aussi frappé, sur certaines affiches,
par les candidats en rang
d’oignons, ou presque. Jean
Lassalle, au premier plan,
devant neuf autres personnes,
Asselineau devant douze
personnes, Valérie Hayer
devant six personnes et
surtout La France insoumise,
où l’on voit à gauche la tête
de liste, Manon Aubry, et à
droite huit personnes en
arrière-plan devant lesquelles
trône Jean-Luc Mélenchon
(avant-dernier sur la liste).
Seule la liste Lutte ouvrière aligne ses 81
candidats sur une photo où
l’on distingue à peine les
visages.
Tout cela me fait penser au jeu de massacre
auquel nous jouions dans les
foires, quand j’étais gosse.
En face de nous des figurines
variées (Asselineau, Lassalle
ou Mélenchon n’existaient pas
encore) qu’il fallait
descendre en lançant des
boules généralement faites de
chiffons.
Mais, pour revenir au début et à nos 38
listes, il est pratiquement
certain que seules cinq ou six
d’entre elles auront des
députés élus (il faut pour
cela avoir au moins 5% des
suffrages), et comme, pour
être remboursé des frais de
campagne, il faut avoir au
moins 3% des suffrages, une
bonne trentaine de listes ne
sera pas remboursée.
Tout ça pour ça ?
Eh oui, tout ça pour ça.
23
mai 2024: La
CPI met les
pieds des lois
internationales dans le plat
des massacres
Il
y a depuis quelques mois en
France deux mouvements
d’opinion entre lesquels tout
débat semble impossible. D’un
côté ceux qui défendent de
façon inconditionnelle Israël,
de l’autre ceux qui
considèrent que le Hamas mène
un juste combat de libération
de la Palestine. Et les uns
comme les autres sont sourds à
tout argument tendant à
tempérer ou à relativiser
leurs positions.
Ne
serait-il pas possible de
passer de la passion à la
raison ? D’analyser la
situation de façon plus fine ?
Il y a en effet d’une part une
entité terroriste, le Hamas,
dont la direction politique
vit tranquillement au Qatar,
et qui est loin de représenter
l’ensemble du peuple
palestinien. De l’autre une
entité politique, le
gouvernement israélien, dont
la survie repose sur quelques
députés ultraorthodoxes,
contesté par une bonne partie
du peuple israélien. Le
premier ministre israélien,
Netanyahu, qui laisse depuis
longtemps le Qatar financer le
Hamas, a tout intérêt à
prolonger la guerre dont la
fin signifierait sans doute
pour lui un passage devant la
justice. Et le Hamas n’existe
que par la guerre. Dans les
deux cas, aucune proposition
politique si ce n’est le
jusqu’auboutisme : la
disparition d’Israël pour les
uns, la colonisation
définitive de la Cisjordanie
pour les autres. Et, pour
revenir aux deux mouvements
d’opinions français, les uns
traitent ceux d’en face comme
des antisémites qui eux-mêmes
les traitent de sionistes. Les
uns veulent ignorer ou nier
les viols les tueries du 7
octobre 2023, les autres les
dizaines de milliers de morts
civils à Gaza. Chacun condamne
l’autre. Et, sur le terrain,
deux entités qui jouent leur
survie politique sans se
préoccuper de de l’avenir
géopolitique des peuples
qu’ils prétendent représenter.
La
Cour pénale internationale
vient de mettre les pieds des
lois internationales dans le
plat des massacres. Le
procureur général de la CPI a
en effet requis cinq mandats
d’arrêt, d’une part contre
deux Israëliens, Netanyahu et
son ministre de la défense
Yoav Gallant, d’autre part
contre trois cadres du Hamas,
Yahya Sinwar, Mohamed Deïf et
Ismaël Haniyed.
Cette
décision doit bien sûr est
avalisée par
les juges de la CPI. Mais
d’ores et déjà, les
réactions pleuvent. Les uns
dénoncent l'établissement
d'une symétrie pour eux
inacceptable entre le Hamas
et Israël, les autres
traitent le procureur, Karim
Khan, d’antisémite. Tout
cela relève d’une évidente
mauvaise foi. Tout d’abord
la requête ne vise pas des
pays mais des individus,
trois Palestiniens et deux
Palestiniens et si elle
n’avait concerné que les uns
ou les autres on aurait
parlé d’inégalité de
traitement, de « deux
poids deux mesures ».
En outre Karim Khan propose
d’inculper ces individus
pour des raison différentes,
meurtres, prise d’otages,
viols et torture pour les
trois membres du Hamas,
crimes de guerre et
utilisation de la famine
comme arme de guerre pour
les deux membres du
gouvernement israélien.
C’est d’ailleurs le même
Karim Khan qui a obtenu il y
a quelques mois un mandat
d’arrêt contre Vladimir
Poutine et personne n’a dit
à l’époque qu’il était
raciste ou russophobe. En
bref, le procureur de la CPI fait du droit et non pas
de la politique.
On
a beaucoup dit ces dernières
semaines que, quoiqu’il
arrive, Israël avait déjà
perdu la guerre, en
particulier sur le plan moral.
Il serait plus juste de dire
que c’est Netanyahou qui
bafoue la morale et qui, par
contre coup, déconsidère son
pays. Et la CPI, rappelant que
personne n’est au-dessus des
lois, en l’occurrence du droit
international, souligne ce que
beaucoup veulent
oublier : d’une part
qu’Israël devrait être aux
yeux du droit international
traité de la même façon que
n’importe quel autre pays,
d’autre part pour le Hamas
qu’il faut distinguer entre
une lutte de libération et le
terrorisme.
18
mai 2024: Usseewa ("Ta
gueule!")
Quiconque
est allé au Japon aura
remarqué des formes de respect
ou de politesse qui passent
par le comportement corporel
ou gestuel. Ainsi, lorsqu’on
arrive dans un grand magasin à
l’heure de l’ouverture, il est
fréquent de voir tout le
personnel rangé en deux files
et inclinant le torse devant
les premiers clients. Mais on
verra aussi bien un ministre
faire de même avant de prendre
la parole dans une conférence
de presse, ou un accusé
s’inclinant devant le
tribunal. On peut percevoir ces formes de respect
sans connaître un seul mot de
japonais. Pourtant la façon de
parler est également liée non
seulement au respect mais
aussi aux rapports sociaux,
aux rapports de force voire au
sexisme.
Il
existe en effet au Japon de
qu’on appelle keigo (敬
語),
la
langue du respect, qui se
divise en plus plusieurs
catégories, langage poli,
langage du respect ou langage
de la modestie, marquées par
un vocabulaire ou des verbes
spécifiques, un système
grammatical très formalisé. La
langue porte ainsi différentes
façons de se situer par
rapport à l’autre. Et les
choses sont encore plus nettes
pour ce qui concerne
l’inégalité des sexes. Il
existe en effet une variante
féminine de la langue (onna
kotoba 女
言葉,
« mots des femmes »),
passant
par le vocabulaire et la
syntaxe.
Dans
le grand quotidien japonais Asahi
Shimbun, le linguiste
Satoshi Kinsui explique que ce
langage des femmes prend
racine à la fin du 19ème siècle à la fois dans la
famille impériale et dans les
écoles de filles qui se sont
multipliées à la fun de Meiji.
Il souligne par exemple que
les femmes terminent souvent
leur phrases en ajoutant
« s’il vous plaît »
ou « n’est-ce pas »,
minimisant ce qu’elles disent
ou en prenant soin de ne pas
contredire ce que dit l’autre.
Elles n’utilisent pas les
ordres, le refus, encore moins
les insultes, qui
appartiennent au langage
« viril ».
Mais
ce qu’il y a d’intéressant,
c’est qu’il décrit également
la façon dont les femmes
commencent à changer. Ainsi
une jeune chanteuse, Ado, a
connu un grand succès avec une
chanson dont le titre est Usseewa (« ta »gueule !»),
utilisant des formes comme Kusodari (« vas te faire
foutre ») ou Kichifusageya (« ferme bien ta
gueule ! ») pour
protester contre la société
masculine. Et il termine en
suggérant que les hommes
devraient, dans leur parler,
exprimer leur part de féminité
et que les femmes devraient
s’entraîner à résister à ceux
qui les agressent en lançant Yamero (« Arrête ! »)
ou Usseewa.
Si
salutaires que puissent être
ces résistances linguistiques,
il demeure, si nous oublions
un instant le sexisme,
que les marques de respect,
hypocrites ou non, sont au
centre de la communication
japonaise.
Nous
sommes loin des
« casse-toi
pauv’con » d’un Sarkozy,
« ça m’en touche une sans
faire bouger l’autre »
d’un Chirac ou « un
pognon de dingue » d’un
Macron.
9
mai 2024: Un esprit sain?
L’esprit ne
vole pas très haut chez les
amateurs de football. Mardi le
PSG a été éliminé par Dortmund
dans la ligue des champions et
le lendemain c’était la joie
chez les supporters de
l’Olympique de
Marseille : lorsque
l’ennemi parisien est battu,
les Marseillais se
réjouissent. Or Marseille
rencontre ce soir en
demi-finale de la coupe Europa les Italiens du club
Atalanta, et j’ai entendu dans
mon bistrot habituel un client
lancer : « Si
Marseille gagne jeudi, l’émir
du Qatar mangera du
cochon ». Intéressant jeu
de mots dans lequel l’esprit
sportif s’efface devant le
racisme. Ce n’est plus un
esprit sain dans un corps sain
mais un esprit sain dans un
porcin
5
mai 2024:
Mimétisme et
récupération
Depuis une
vingtaine d’années, on est en
droit de se demander si des
chercheurs des enseignants ou
des étudiants français pensent
par eux-mêmes ou se jettent
régulièrement sur la dernière
nouveauté venue des USA. Un
bon exemple en est la vogue du
wokisme qui, partant de
combats légitimes, a fait
passer la passion avant la
raison, brouillant les cartes
en mettant l’idéologie avant
la démarche scientifique.
Tout
récemment, des étudiants de
l’école des sciences
politiques de Paris, puis
d’autres villes en province,
ont bloqué leur locaux avec
des slogans ou des
revendications directement
empruntés aux étudiants
américains, ce qui amène
plusieurs remarques. La
première concerne l’efficacité
de ces revendications. Le
gouvernement américain est en
effet le grand fournisseur
d’armes d’Israël, et il
pourrait mettre fin aux
massacres de Gaza en bloquant
ses livraisons. De ce point de
vue, les étudiants américains
disposent d’une cible évidente
et légitime, ce qui n’est pas
le cas des Français, dont le
gouvernement ne peut que
dénoncer la politique de
l‘état israélien. La seconde
remarque concerne les deux
côtés de l’Atlantique. L’armée
israélienne massacre des
civils à Gaza, et c’est
scandaleux, le Hamas a tué des
civils le 7 octobre en
Israël est c’est
également scandaleux: ne voir
et ne dénoncer que le premier
de ces massacres relève d’une
vision ou d’un analyse
hémiplégiques, qui frôlent la
mauvaise foi. Entre outre,
réclamer comme le font
certains étudiants français que les
relations avec les universités
israéliennes soient abolies
est particulièrement stupide:
de nombreux Palestiniens y
étudient, qu'ils soient de
Cisjordanie ou d'Istaël.
Mais ce qui
frappe le plus est, en France,
l’instrumentalisation des
manifestations étudiantes. Le
maître d’œuvres de ce cette
récupération est, encore une
fois, Jean-Luc Mélenchon.
Comparer, comme il l’a fait,
le président de l’Université
de Lille au criminel de guerre
nazi Adolf Eichmann, pourrait
relever des tribunaux. Et
faire de Gaza un enjeu
électoral européen est
incompréhensible. Ajoutons à
cela le sort réservé à Raphaël
Glucksmann, empêché de défiler
le 1er mai à
Saint-Etienne par des militants de la
jeunesse communiste et de la
France insoumise, qui relève
du totalitarisme. Ce
dogmatisme, ce refus de tout
débat, augure mal de l’avenir
de la gauche. Ce n’est pas en
invisibilisant les arguments
des autres qu’on fait avancer
la réflexion.
On pourrait y
voir une réaction au fait que
les sondages donnent un large
avantage à la liste de
Glucksmann aux élections
européennes, et qu’il convient
de tirer sur lui en priorité. Mais il y a peut-être
une autre explication à ces
comportements. J’ai tendance à
penser que Mélenchon n’a
jamais voulu être élu
président de la République, ou
qu’il n’a jamais pensé pouvoir
l’être. D’ailleurs, s’il était
parvenu en 2017 au second tour
face à Le Pen, il est probable
que cette dernière aurait été
élue. En revanche, plutôt que
ce chemin démocratique qu’est
la voie électorale, il imagine
que seuls des mouvements
sociaux pourraient mener à une
situation révolutionnaire et à
la sixième république dont il
rêve. Et cette analyse n’est
pas sans rapport avec ses
origines trotskystes. Or ces
éventuels mouvements sociaux
ne peuvent pas venir de la
classe ouvrière ou de ce qu’il
en reste : elle vote de
plus en plus à l’extrême
droite et le parti communiste
est au plus bas. Il se tourne
donc vers ce qu’il croit être
la seule force
« révolutionnaire »,
la jeunesse de certaines
banlieues, largement
abstentionniste. Pour des
raisons sociologiques
évidentes, cette jeunesse
défavorisée est en grande
partie issue de l‘immigration
maghrébine ou africaine,
elle-même plutôt musulmane.
Cela explique le comportement
ambigu de Mélenchon, son oubli
volontaire des principes de la
laïcité, sa répugnance à
condamner l’islamisme,
l’amalgame qu’il fait entre le
Hamas et le peuple
palestinien, tout cela étant à
l’origine de l’accusation d’islamo-gauchisme dont il est l’objet et qu’il
n’a pas volée. Mais se
rend-t-il compte qu’il favorise ainsi le communautarisme,
qu’il assigne ceux dont il veut
faire ses électeurs à des
catégories qu’il invente du
même coup ? Et tout cela ne fait
guère avancer la cause qu’il
prétend défendre.
Ceci dit, le
mimétisme d’une partie des
chercheurs des enseignants ou
des étudiants français par
lequel j’ai débuté, cette
imitation avide de pseudos concepts
venus des USA, trouve son
contraire dans un autre
domaine. On parle beaucoup
dans les media des ennuis
judicaires de l’ex-président
américains D. Trump. Mais on
oublie que, sur ce point,
notre ex-président N. Sarkozy
l’a précédé. Quand même !
La France aussi peut être un
modèle !
25 Avril
2024: De l'archipel de
la bonne conscience au
dépotoir de
l'inconscience

Il y a bien
longtemps, en 1981, j’ai passé
une semaine aux îles Galapagos,
sur un bateau qui nous menait
d’île en île. Les oiseaux, les
phoques, les iguanes, qui
n’avaient jamais été chassés,
nous regardaient à peine quand
nous passions à côté d’eux.
L’archipel était en effet très
protégé, le nombre de touristes
quotidiens soigneusement
contingenté, les déplacements
limités à quelques chemins,
interdiction de camper, de faire
du feu, de ramasser la moindre
pierre, la moindre plume, afin
de ne pas rompre l’équilibre de
la nature. Nulle part ailleurs,
à ma connaissance, l’homme
n’avait été aussi conscient de
ses responsabilités face au
monde, à la nature, à la
pollution.
Aujourd’hui
les plages sont inondées de
déchets en plastique, sacs,
bouteilles, filets de pêche,
bidons, voire brosses à dents,
des détritus que l’on ramasse
tous les matins avant de
recommencer le lendemain. On
en trouve jusque dans les
estomacs des animaux, tortues,
phoques, pélicans. Et les
étiquettes, sur les
bouteilles, indiquent leur
provenance : sur le
podium le groupe chinois
Tingyi, fabriquant de nouilles
et de boissons, AJE Group,
multinationale de boissons et
Coca Cola. Tous ces déchets
sont jetés à la mer par les
énormes bateaux de pêche qui
croissent à la frontière des
eaux territoriales.
En 1981 je
pensais aux indiens quichuas
avec lesquels je venais de
travailler, sur le continent,
mille kilomètres à l’est,
théoriquement citoyens à part
entière de l’Équateur,
dépendant du même gouvernement
que ces animaux, et ne
jouissant pas de la même
protection. Les Galapagos
m’étaient apparues comme
l’archipel de la bonne
conscience. Partout à travers
le monde des cultures et des
langues disparaissaient devant
le rouleau compresseur de la
loi du plus fort ou du plus
efficace et ces îles perdues
constituaient un ghetto de
nature inviolée : vous
voyez bien, nous songeons à
l’avenir, nous protégeons ce
qui doit être protégé.
L’archipel de
la bonne conscience est
aujourd’hui devenu le dépotoir
de l’inconscience, la victime
de la pollution sauvage
mondialisée. C’est ce que
certains appellent le progrès…
18 Avril
2024: Préparer la
défaite ou mobiliser
les troupes?
Sabrina Agresti-Roubache,
ministre déléguée à la
citoyenneté a eu à propos des
futures élections européenne
cette phrase remarquable
de perspicacité: « les
seules élections qu’on perd,
ce sont celles qu’on ne mène
pas ».
Cela
m’a
rappelé un slogan lancé en
1991 par la FDJ (la Française
des jeux), « 100% des
gagnants ont tenté leur
chance », ou cet autre,
en 2020, « on n’est
jamais sûr de ne pas
gagner ». Dans ces deux
cas, deux secondes de
réflexions permettent de voir
que 100% de perdants ont aussi
tenté leur chance, ou qu’on
n’est jamais sûr de ne pas
perdre. Peut-être faut-il
réfléchir un peu plus pour se
rendre compte que,
statistiquement, on a beaucoup
plus de chance de perdre que
de gagner. Et il faut
consulter les données de la
FDJ pour savoir que, tous jeux
confondus, seulement 60% des
sommes misées (j’arrondis les
chiffres) sont redistribués
aux joueurs, le reste allant
aux impôts et à la FDJ qui,
eux, sont donc toujours sûrs
de gagner, mais sans jouer.
C’est-à-dire que si l’ensemble
des individus qui jouent au
loto, au tiercé ou à tout
autre chose, se considéraient
comme un seul joueur, un
joueur collectif, il se fait
régulièrement plumer. Ce
joueur collectif paie des
impôts même s’il ne gagne pas,
un impôt sur le rêve de
gagner.
Revenons à la formule dont nous sommes partis,
« les seules élections
qu’on perd, ce sont celles
qu’on ne mène pas ».
Contrairement aux formules de
la FDJ, on ne peut pas la
transformer : « les
seules
élections qu’on gagne, ce sont
celles qu’on ne mène
pas » ne fait aucun sens.
Mais comme il est peu probable
qu’une ministre déléguée dise
quelque chose sans l’aval de
Matignon ou de l’Elysée, il
faut bien nous interroger sur
le sens de cette formule. Il
ne s’agit pas d’une tautologie, d’une
évidence, d’un truisme ou
d’une lapalissade et nous
pouvons y voir deux
choses différentes. Soit
un coup de couteau dans le dos
de ceux qui n’auraient pas
assez bien mené la campagne de
la liste de la mino-majorité
présidentielle, soit un appel
au peuple pour qu’il mène la
campagne des élections
européennes.
Donc
préparer
la défaite ou mobiliser les
troupes pour l’éviter. Les
deux n'étant d'ailleurs pas
contradictoires. Ce qui nous
donne une idée de l’état
d’esprit actuel du
pouvoir : la trouille.
16 Avril
2024: Le bal des
faux-culs
S’il
existait
un palmarès des pays faux-culs
(je veux parler du discours
des gouvernements et non pas
des peuples) ils seraient
nombreux à se disputer une
place sur le podium. La Chine,
la Russie, les USA, Israël,
l’Iran mais aussi la France et
quelques autres.
Prenons
un
exemple récent. Biden, le
président américain, déclare à
qui veut l’entendre (et
surtout à une partie de son
électorat) « l’Amérique
continuera à défendre
Israël » et laisse
entendre (pour une autre
partie de son électorat) qu’il
demande continument à
Netanyahou d’arrêter ses
massacres à Gaza. Bel exemple
d’injonction paradoxale ou
contradictoire. En effet, si
Biden voulait vraiment mettre
fin au massacre des Gazaouis, il
disposerait
d’un moyen évident :
arrêter les livraisons
quotidiennes d’armes
américaines à Israël. Biden
ajoute par ailleurs que
« l’Amérique ne
cautionnera pas une
intervention sur
l’Iran ». Mais comment
Israël pourrait-il intervenir
efficacement en Iran sans les
armes américaines ?
Passons
sur
Israël, qui ignore depuis
toujours les résolutions de
l’ONU, colonise sans vergogne
la Cisjordanie, se comportant
comme ce que les Américains
appellent des « états
voyous », et prenons le
cas de la France.
Stéphane
Séjourné,
ministre français des Affaires
étrangères, expliquait
avant-hier à la
télévision : « nous
n’intervenons pas pour
défendre Israël mais pour
participer au maintien de la
sécurité dans la
région ». Puis il
ajoute :
« N’inversons pas les
responsabilités. C’est l’Iran
qui a attaqué Israël ».
On pense à ces gamins qui dans
la cour de l’école, sermonnés
par une surveillant voulant
mettre fin à une bagarre,
lancent : « C’est
pas moi qui a commencé,
m’sieur, c’est l’autre ».
Or, trois jours avant, Israël
avait bombardé le consulat
israélien à Damas en tuant une
quinzaine de personnes,
c’est-à-dire qu’en droit
international il avait attaqué
un territoire iranien. Notre
ministre a-t-il la mémoire
courte ? En fait il a une
très bonne mémoire, mais pour
retenir les éléments de
langage qu’on lui dicte. Il ne
pense pas, il récite. Encore
un faux-cul.
Bref,
nous
pourrions allonger cette liste
à l’infini. Dans tous les cas,
dès que l’on parle en
géopolitique d’Israël, on
aligne des fauxculteries
(qu’on me pardonne ce
néologisme). Prenons un
exemple marginal mais
significatif. En 1958, lors de
la Coupe du Monde de football,
Israël a gagné quatre matches
d’affilée sans jouer :
quatre pays (Turquie,
Indonésie, Egypte et Soudan)
avaient refusé de jouer contre
lui. Plus tard l’Europe a
décidé d’intégrer Israël dans ses
compétitions. Et, en 2022, le
PSG a donc affronté l’équipe
du Maccaci Haïfa dans la ligue
européenne des champions.
Illogisme géographique ?
Cataplasme sur une jambe de
bois ? En fait, encore
une fois, plutôt que
d’affronter une question
politique, celle du droit des
Palestiniens à avoir une
terre, plutôt que d’imposer la
solution de deux états, on
pousse la poussière sous le
tapis.
Non
seulement
ils sont faux-culs mais encore
ils sont sales.
12 Avril
2024: Macron et les
chrysanthèmes

« Inaugurer
les chrysanthèmes ». On
prête cette expression au
général de Gaulle qui, en
1965, avait déclaré dans une
conférence de presse :
« qui
a jamais cru que le général de
Gaulle étant appelé à la
barre, devrait se contenter
d’inaugurer les
chrysanthèmes ? »
Quoi qu’il en soit, elle est
aujourd’hui utilisée pour
désigner ceux dont le pouvoir
n’est qu’honorifique et qui
n’ont pas autre chose à faire
que de se rendre dans diverses
cérémonies, ce qui était le
cas des présidents de la
République des années 1940 et
1950.
Coincé par son absence de majorité à l’Assemblée et l’échec de sa
politique économique, Macron a
certes encore un peu de
pouvoir, mais il passe
beaucoup de temps en
commémorations,
panthéonisations et
décorations. Disons qu’il est
inaugurateur de chrysanthèmes
à mi-temps…
Sa
dernière trouvaille, si l’on
en croit les rumeurs, serait
de décorer une chrysanthème un
peu fanée, Michel Sardou. Les
mêmes rumeurs disent que le
président va décorer
« une légende de la
chanson française ». N’en
jetez plus ! Sardou est
le plus réactionnaire des
chanteurs français
contemporains. Ecoutez, si
vous ne craignez pas la
nausée, Les villes de
solitude, Les
ricains, Je suis
pour… Apologie du viol,
de la peine de mort, de
l’impérialisme US… Je me fout
de lui comme de ma première
vérole, mais on pourrait créer
une nouvelle science, la décorologie,
qui ferait un portrait en
creux de celui qui décore à
partir de ceux qu’il décore.
Bon,
vous imaginez que je ne suis
pas un déçu du macronisme.
Pour être déçu, il faut y
avoir cru. Je
n’ai jamais eu d’illusions sur
ce fils de la bourgeoisie,
banquier de peu de compétence
si on en croit les résultats
de sa politique actuelle,
attrape tout et surtout
amateur en politique, si la
politique implique une
connaissance du peuple, du
pays, une certaine empathie
pour les électeurs qu’il tente
de convaincre.
Bref,
j’ai autre chose à faire que
de jeter les bases de cette décorologie,
mais Sardou, quand même !
Macron devrait se trouver un
conseiller en chrysanthèmes.
6 Avril
2024: Rééditions

Publié
il y a cinquante ans, en 1974, Linguistique et
colonialisme a connu
jusqu’ici trois rééditions et,
pour chacune d’entre elles,
j’avais rédigé une préface
différente. L’ouvrage étant
épuisé depuis son édition en
format de poche de 2002, nous
avons décidé de le republier à
l’occasion de la tenue d’un
colloque sur le thème «
Linguistique et colonialisme
», 50 ans après, Nouvelles
pratique , nouvelles
résistances, (Tunis-Hammamet,
octobre 2024). Cette cinquième
édition comporte donc en
annexe trois préfaces
(successivement de 1979, 1988
et 2002) auxquelles s’ajoute
un entretien réalisé par
Cécile Van den Avenne en 2012
et publié dans la revue Glottopol.
L’ensemble peut être considéré
comme un document
d’historiographie linguistique
destiné à alimenter la
réflexion et la discussion.
J’ajoute
qu’en relisant ces textes, je
me suis rendu compte que si
l’ouvrage restait ne
varietur, les points de
vue développés témoignaient
des différentes recherches que
j’avais continué à mener. Si,
en 1978, il était fait
allusion à une dizaine
d’ouvrages publiés par
d’autres dans les quatre
années précédentes, je citais
en 1988 La guerre des langues
publiée en 1987, et en 2002
plusieurs publications, les
unes ayant précédé
Linguistique et colonialisme,
les autres (La
sociolinguistique, Pour
une écologie des langues du
monde, etc.) plus
récentes.
À vingt-trois ans de distance, et sans que
j’en aie été conscient au
moment où je les écrivais,
deux des préfaces se terminent
à peu près par la même phrase,
« un énorme travail reste ici
à faire : notre
travail… » (1979) et
« ce qui signifie qu’il
reste encore beaucoup de
choses à faire » (2002).
Peut-être les discussions que
les annexes de ce volume
permettront d’ouvrir
mèneront-elles à une avancée
de ce travail qui reste à
faire.
Depuis
sa première édition (1993), La
sociolinguistique a
connu au fil des rééditions de
nombreuses mises à jour. Les
unes n’étaient que des ajouts,
en particulier
bibliographiques. Les autres
étaient plus importantes.
Ainsi dans la cinquième
édition (2005), six pages du
premier chapitre (« Les
positions marxistes sur la
langue ») étaient supprimées,
pour laisser place à deux
pages sur la sociolinguistique
urbaine dans le
chapitre 2 et à quatre pages
(« de l’analogique au digital
») dans le chapitre 5. Ou
encore, dans les huitième
(2013) et neuvième (2017)
éditions, la bibliographie
était considérablement
augmentée.
Les
raisons de ces modifications
tenaient, pour les ajouts, à
l’évolution de la recherche.
Les suppressions pour leur
part répondaient à
deux impératifs.
D’une part au fait que le
format de la collection Que
sais-je ? est
immuable et qu’à un ajout
doive correspondre une
suppression approximativement
du même format. Et d’autre
part, dans ce cas particulier,
au fait que la « linguistique
marxiste » s’était révélée
comme une impasse.
Dans
cette dixième édition, c’est
un chapitre complet, le
sixième qui est supprimé,
remplacé par un chapitre final
qui tient en même temps lieu
de conclusion : « Un
éclatement de la
sociolinguistique ? ». On
y trouve une présentation
succincte des positions que
j’ai présentées dans mon
dernier livre, Pour en
finir avec la
sociolinguistique.
25
Mars 2024: La police
des mots
Non,
je
ne vais pas vous parler de
politiquement correct, de
féminisation ou d’écriture
inclusive mais le
l’Afghanistan. On y parle une
quarantaine de langues dont
deux sont officielles, le dari
(une variété de farsi, de
persan) et le pachto. La
première est parlée par
environ 20 millions de gens,
la seconde par une dizaine. Or
les talibans, qui sont très
majoritairement pachtouns, se
sont lancés dans une chasse
aux mots
« étrangers », en
particulier dans certaines
universités et dans les
publications scientifiques.
Mais qu’est-ce qu’un mot
« étranger » ?
Il
existe
en France, dans les différents
ministères, des commissions de
terminologie qui publient
régulièrement des listes de
néologismes présentés comme
des équivalents de mots
« étrangers » et
devant les remplacer. Et ces
mots étrangers sont tous des
mots anglais, ce qui témoigne
d’une réalité linguistique
mais pourrait aussi mériter une analyse
psychanalytique. Or les
talibans, pour leur part s’en
prennent aux mots daris. Ils
acceptent par exemple des
mots ourdou ou anglais mais
pas ceux venant du farsi,
c’est-à-dire la langue parlé
en Iran. Dès lors on comprend
que la « pureté » de
la langue ne repose pas sur
des critères linguistiques
mais plutôt religieux. Les
talibans sont en effet
sunnites et les iraniens
chiites. Derrière la guerre
des mots apparaît donc une
guerre des obédiences
religieuses, et la police des
mots et en fait une police
religieuse.
C’était
une
petite chronique de la
connerie ordinaire.
11
Mars 2024: Imbéciités
Dans
un
article de Libération,
au demeurant très intéressant,
consacré à la future élection
présidentielle au Mexique
(deux femmes en lice, l’une de
droite et l’autre de gauche)
que j’ai lu la semaine
dernière, deux formules
étranges sautaient aux
yeux :
« Les
collectives
féministes »
« Une
anti-monumente »
Et,
dans
les deux cas, la même note de
bas de page : « Le
terme est féminisé à
dessein ». Le but était
évidemment de féminiser les
mots collectif et monument. Mais dans quel
but ?
En
1978, Nicole-Lise Bernheim et
Mireille Cardot publiaient Mersonne ne m’aime, « polar
féministe » présenté
comme une « romance
policière » dans lequel
le remplacement de la syllabe
/per/ par /mer/ produisait des
jeux de mots en série
(mersonne, donc, Mère
Lachaise, mère de claques,
etc.) qui firent beaucoup
rire.On
peut bien sûr, au prix d’une
constante gymnastique mentale,
remplacer perspicace par merspicace, percevoir par mercevoir, percer par mercer ou persifleur par mersifleur,
etc., mais il est douteux que
cela ait fait avancer d’un
iota vers une
communication sans stéréotype
de genre. Bernard Pivot avait
invité à son émission de télé Nicole-Lise
Bernheim,
Mireille Cardot et
Frédéric Dard (l’auteur des San
Antonio) et tous les
trois s’étaient bien amusés,
complices dans les jeux de
mots, mais
la cause féministe n’était pas
vraiment évoquée. Il
s’agissait pour les autrices
de s’amuser à faire
disparaître le père derrière
la mère, alors que dans
l’article évoqué plus haut il
s’agit de donner une finale
féminine à des mots neutres, collectif et monument.
Et,
là aussi, on voit
mal en quoi une phrase comme
« Dans la cuisine de sa
appartemente elle se
préparait une sandwitche avec deux tranches de
paine, de la
jambonne et de la
beurre » ferait en
quoi que ce soit avancer la
cause des femmes. On pourrait
même mettre le féminisme au
féminin, la féminisme,
mais cela aurait peut-être pour effet d’écarter
les hommes, je l’espère
nombreux, qui soutiennent
cette cause.
Cette
posture un peu imbécile me
fait penser à la liste
ironique que dresse Mohamed
Mbougar Sarr dans son
roman Le plus secrète
mémoire des hommes (éditions
Philippe Rey, 2021):
« W.
est le premier romancier noir
à recevoir tel prix ou à
entrer dans telle
académie : lisez son
livre, forcément fabuleux.
X.
est la première écrivaine
lesbienne à voir son livre
publié en écriture
inclusive : c’est le
grand texte révolutionnaire de
notre époque.
Y.
est bisexuel athée le jeudi et
mahométan cisgenre le
vendredi : son récit est
magnifique et émouvant et si
vrai !
Z.
a tué sa mère en la violant,
et lorsque son père vient la
voir en prison, elle le branle
sous la table du
parloir : son livre est
un coup de poing dans la
gueule. »
8
Mars 2024: Journée des
droits de la femme
Je
ne sais plus qui a dit
« quand je me regarde je
me désole, quand je me compare
je me console ». Mais la
France n’a guère à se désoler.
Prenez l’Irlande par exemple.
Ce pays, qui est l’un des deux
paradis fiscaux de l’Union
européenne, l’autre étant le
Luxembourg (c’est marrant, on
n’en parle jamais) ne brille
guère sur l’égalité des sexes.
En cette journée des droits de
la femme, je vous invite à
lire le texte ci-dessous.
41.1
1°
L'État
reconnaît la famille comme
le groupe naturel, primaire
et fondamental de la
Société, et comme une
institution morale possédant
des droits inaliénables et
imprescriptibles, antérieurs
et supérieurs au droit
positif.
2° L'État, par conséquent,
garantit la formation et
l'autorité de la famille,
comme la base nécessaire de
l'ordre social et comme
indispensable au bien-être
de la nation et de l'État.
41.2
1°
En particulier, l'État
reconnaît que, par sa vie au
foyer, la femme apporte à
l'État un soutien sans
lequel le bien commun ne
peut être atteint.
2° L'État, par conséquent,
s'efforce de veiller à ce
que les mères ne soient pas
obligées par les nécessités
économiques à travailler en
négligeant les devoirs de
leurs foyers.
41.3.
1°
L'État s'engage à prêter une
attention spéciale à
l'institution du mariage sur
laquelle la famille est
fondée et à la protéger
contre toutes les attaques.
2° Aucune loi accordant la
dissolution du mariage ne
peut être adoptée.
3° Aucune personne dont le
mariage a été dissous selon
la loi civile d'un autre
État, mais dont le mariage
reste valable selon la loi
en vigueur à cette époque
sous la juridiction du
Gouvernement et du Parlement
établis par la présente
Constitution, ne peut
contracter un mariage valide
sous cette juridiction
durant la vie de l'autre
personne avec laquelle elle
était mariée.
Ces
lignes,
qui puent le catholicisme
rance, viennent de la
constitution irlandaise
(article 41). Eh oui ! Ce
n’est sans doute pas par
hasard si en France
l’introduction du droit à
l’IVG a été introduite dans la
constitution quelques jours
avec le 8 mars. En Irlande, la
population est invitée
aujourd’hui, journée des
droits de la femme, à voter
sur la suppression de cet
article. Je suppose que les
femmes croisent les doigts et
que les curés se désolent.
1er
Mars 2024: Lysistrata?
Lorsqu’on voit qu’aux USA le droit à
l’avortement est remis en
question dans un certain
nombre d’états, qu’en Pologne
il est de plus en plus
restreint, qu’en Hongrie on
fait entendre aux femmes
voulant avorter les battements
de cœur des
fœtus, qu’au Parlement
européen les députés reçoivent
des fœtus en plastique, on ne
peut que se réjouir du vote
des sénateurs en France. Le
droit à l’avortement sera donc
sans doute inscrit dans la
constitution la semaine
prochaine.
Pourtant la chose ne semblait pas aussi simple.
Les catholiques traditionnels,
qu’on avait beaucoup entendus
lors du débat sur le mariage
pour tous, comme les musulmans
intégristes, font dans notre
société un bruit
assourdissant. La presse
Bolloré est envahissante, le
Rassemblement National
progresse mais, sur ce point
particulier, tout ce bruit
était illusoire. On
s’attendait qu’au Sénat, où
domine largement la droite, le
texte de cette loi soit
remanié, amoindri, voire
refusé. Le président du Sénat,
Gérard Larcher, avait pris
position contre, Bruno
Retailleau, chef de file des
sénateurs LR, avait annoncé
être sur la même position…
Mais le texte a été voté à une
large majorité.
Cette victoire, qu’il faut saluer, signe
peut-être la fin de cette
droite se disant héritière du
gaullisme et qui ne sait plus
où elle est. Malgré les
pitreries d’un Ciotti, le
Parti Républicain ressemble de
plus en plus à une peau de
chagrin. Certaines de ses
tête, comme Rachida Dati, ont
rejoint la droite centriste de
Macron, d’autres se font
lentement aspirer par
l’extrême droite du
Rassemblement national. Selon
les sondages sur les élections
européennes à venir, LR avec
8% des voix, serait derrière les socialistes (11%)
, les écologistes (7%), la
France insoumise (7%) et bien
sûr le RN (30%). Bref les
héritiers de ceux qui ont
gouverné la France pendant une
quarantaine d’années,
entrecoupée par les quatorze
ans de François Mitterrand et
les cinq de François Hollande,
semblent sur le point de
disparaître.
Au-delà de ces considérations politiques, il
faut cependant souligner un
autre phénomène. C’est la
droite masculine rance,
accrochée à ses préjugés
idéologiques, qui semble avoir
abdiqué devant les femmes. Les
femmes sénatrices d’abord qui,
toutes appartenances
politiques confondues, ont
plus que les hommes voté pour
ce texte. Mais peut-être aussi
devant leurs femmes. Certains
ont même confié que leurs
filles le avaient menacés de
ne plus leur parler s’ils ne
votaient pas le texte.
Le Grec Aristophane avait dans sa pièce Lysistrata mis en scène une guerre
du sexe, les femmes des cités
grecques, pour mettre fin à la
guerre entre Athènes et
Sparte, décidant de n’avoir
plus aucune relation avec leur
mari. Je n’ai bien sûr aucun
moyen de savoir sir les femmes
des parlementaires de droite
ont utilisé de tels arguments.
Mais ce vote nous montre que,
sur ce point au moins, il y
avait un décalage entre les
réflexes idéologiques des
parlementaires de droite et la
société dans son ensemble.
Mais ne rêvons pas. Il reste encore bien des
thèmes, au premier rang
desquels la question des
migrants, sur lesquels notre
société est fermement amarrées
à des positions de droite,
voire d’extrême droite….
25
février: On en apprend
tous les jours
Dans mes mémoires (Tant mieux si la route est
longue, ed.
Lambert-Lucas, 2022) je parle
d’Albert-Paul Lentin, ancien
résistant, ayant combattu pour
la libération de la Corse,
puis ayant été chargé de
mission au tribunal de
Nuremberg. Successivement
journaliste au Libération d’Astier de la Vigerie,
aux Temps modernes de
Jean-Paul Sartre, au Nouvel
Observateur de
Jean Daniel, militant
infatigable de
l’anticolonialisme, il
connaissait tous les leaders
du tiers-monde. Je l’ai connu
pour ma part à Politique
Hebdo, hebdomadaire
d’extrême gauche auquel je
collaborais. Entre 1970 et
1980, je l’ai vu des centaines
de fois, et j’ai souvent mangé
avec lui les jours ou se
réunissait le comité de
rédaction, le mercredi si je
me souviens bien. Il est mort
en 1993, à 70 ans.
Dans
un
livre à paraître la semaine
prochaine aux éditions du
Seuil, A la solde de
Moscou, politiques,
journalistes, hauts
fonctionnaires…Révélations
sur des Français qui
espionnaient pour l’Est,
Vincent Jaubert révèle, entre
beaucoup d’autres choses, que
Lentin a toujours été un
espion du KGB, via
la StB, service d’espionnage
tchécoslovaque qui le
rémunérait. Je dois avouer que
ça vous fout un choc.
On
en
apprend tous les jours…
18
février:
Intersectionnalité

J’ai
lu
cette semaine un article
consacré à un débat au sein de #NousToutes,
organisation féministe
traversée par de multiples
discussions, oppositions,
dénonciations voire
accusations d’antisémitisme.
Le tout avec en toile de fond
les ambigüités de Mélenchon et
de le France insoumise sur le
Hamas et le 7 octobre. Tout
d’abord un note
lexicale : l’expression cancel
culture, importée des
USA, a donné naissance à un
verbe que mon correcteur
orthographique souligne rouge
(mais ça changera sans doute
bientôt) : silencier et
son participe passé silencié.
Pour
le
reste, je vais me contenter de
donner ci-dessous quelques
thème de ce débat et surtout
des citations. La question
centrale, celle autour de
laquelle tournent les
affrontements, est de savoir
si la cause palestinienne est
aussi une cause féministe, et
que deviennent dans cette
situation les femmes juives. On parle ainsi d’une
« une journaliste et
militante transféministe et
anti-impérialiste », de meufs
dans l’orbite du NPA »,
de « juive
décoloniale » et
l’on présente les juifs comme
se trouvant dans « l’angle
mort de l’antiracisme ». D’où
cette déclaration d’une des
femmes interrogées dans
l’article : « si
l’intersectionnalité
s’arrête dès qu’il est
question des femmes juives,
c’est sans moi » .
Un
autre
thème très présent est celui
de la culpabilisation, qui
tient à la nature même de
l’approche intersectionnelle.
Plus celle-ci agrège de
traits, et plus il est
difficile d’y correspondre.
Ainsi certaines déclarent
devoir « se racheter
par rapport aux critiques
les visant comme étant trop
blanches et bourgeoises »,
ce qui n’est pas sans rappeler
la situation jadis
inconfortables des
intellectuels ou des bourgeois
dans les cellules du parti
communiste.
Et
tout
ceci mène donc à ce type de
réflexions : « elles
veulent être les meilleures
alliées des antiracistes, ce
que j’approuve, ça condition
que ce ne soit pas au
détriment de notre propre
cause »
Bon,
il
est probable que
l’organisation #NousToutes s’en sortira, du moins on le
lui souhaite. Mais ce qui est
ici en cause est autre
chose : l’efficacité
théorique et pratique de la
notion d’intersectionnalité. Les voies qu’elle ouvre
et celles qu’elles ferment,
mais aussi les voix qu’elle silencie.
Vous
avez
deux heures pour écrire votre
copie.
11
février: Géopolitique de la
peine de mort

Samedi,
toute
la presse française a rendu
hommage à Robert Badinter, une
des plus grandes figures du
droit et de la politique.
C’est en particulier lui qui,
en 1981, nommé ministre de la
justice par François
Mitterrand, a fait voter la
loi mettant fin à la peine de
mort. Le journal Libération,
en cette occasion, a publié la
carte ci-dessous.

On
y
voit que la peine de mort
reste appliquée dans plus de
cinquante pays dans
le monde. Il est souvent
difficile de savoir le nombre
de ces exécutions. Ainsi, en
Chine, les chiffres sont comme
souvent incertains. Plusieurs
milliers en 2009 selon Amnesty
International, 10.000 en 2005
selon certaines évaluations,
on y exécute à foison. En
Arabie Saoudite, on compte une
centaine d’exécutions par an.
Aux USA les mises à mort (une vingtaine en
2023) se répartissent entre
sept états, Floride,
Californie, Louisiane, Texas,
Alabama, Arizona et Caroline
du Nord. De façon plus
générale, neuf exécutions sur
dix ont lieu dans quatre pays,
Iran, Egypte, Irak et Arabie
Saoudite (mais on ne sait pas
grande chose sur la Chine).
Cette
carte
nous donne donc une vision
géopolitique de la peine de
mort. Elle a été abolie en
Europe et en Amérique du Sud,
est maintenue dans trente pays
africain (même si elle est peu
appliquée), domine en Asie…
Mais vous pouvez aussi
réfléchir sur la définition de
cette peine. Elle n’existe
pas, officiellement, en
Israël, mais ce n’est sans
doute pas l’opinion de la
population civile de Gaza.
Bref,
si
vous faites, le dimanche, un
repas de famille, j’espère que
ces quelques indications ne
vous couperont pas l’appétit.
Mais peut-être vous
donneront-elles quelques idées
sur les lieux ou aller ou non
en vacances.
9 février
2024: Les langues et le fric

Qu’est-ce
qui
rend une langue
attractive ? Qu’est-ce
qui, au-delà de celle dont
nous avons hérité de notre famille ou de notre
environnement social, fait
qu’une langue nous attire ou
nous intéresse ?
Lorsqu’il
y
a une quarantaine d’années
j’ai commencé à enseigner en
Chine, à Canton, j’avais été
frappé par toutes les
représentations qui
entouraient le cantonnais.
Trois heures par jours, cinq
jours par semaines et pendant
deux mois j’avais devant moi
le même groupe de jeunes
chercheurs, et je n’ai pas
réussi à leur faire admettre
qu’il n’y avait pas qu’une
langue chinoise, le
« mandarin » (en
chinois pu tong hua,
« langue
d’unification ») mais
sept ou huit, et que le
cantonais n’était pas un
« dialecte ».
J’avais en outre noté une
sorte de contradiction. Le
gens du Nord se moquaient
beaucoup des Cantonais, en
particulier de leur
prononciation, leur accent,
mais en même temps ils
s’intéressaient à la musique
de rock venue de Hong Kong et
chantée en cantonais. Quelques
années plus tard, lorsque le
capitalisme s’est résolument
installé dans cette dictature
pseudo communisme, j’ai vu
apparaître un intérêt pour le
cantonais de la part des
hommes d’affaires. Il y avait
même une formule faisant
florès, du genre « si tu
veux réussir dans les affaire,
apprends le cantonais et va à
Hong Kong.
Or
il
vient de se produire quelque
chose de semblable, à propos
non plus du cantonais mais de
la langue de Shanghai, le
shanghaïen. Le célèbre
cinéaste Wong Kar-Wai (In
the mood for love, 2046,
etc.) vient de réaliser une
série télévisée (Fan Hua, « fleurs
de Shanghai », traduit en
anglais Blossoms Shanghai)
qui obtient un très grand
succès en Chine. Le succès de
cette série tient à plusieurs
choses. A la personnalité de
Wong Kar-Wai, originaire de
Shang Hai
mais qui a toujours tourné à
Hong Kong, au thème de la
série, l’ascension d’une jeune
homme qui devient millionnaire
dans les années 1990, et au
fait que les dialogues soient
en Shanghaïen (sous-titrés en
mandarin, bien sûr). Selon le magazine
en ligne Sixth tone,
publié en anglais à Shang Hai,
« des milliers de
personnes postent
actuellement des vidéos
d’elles en train d’apprendre
le dialecte de la série sur
le réseau social Xiaohongshu ».
En
d’autre
termes, pour le cantonais
comme pour le shanghaïen, des
langues contre lesquelles la
politique linguistique
officielle lutte, sont
revalorisées par l’engouement
pour la réussite sociale et
pour le fric. On peut
considérer cela comme
désespérant. Imaginez que les
militants des langues
régionales ou minoritaires de
France lancent des campagnes
du genre « apprenez le
corse et faites fortune dans
la mafia », « vous
voulez sauver la pêche,
apprenez le breton », ou
encore « pour réussir
dans les polyphonies, chantez
en corse ou en basque »….
Et
j’espère
que ces militants, s’ils me
lisent, comprendront que cette
dernière phrase relève de
l’humour…
4 février 2024: Pour me
désennuyer

Pour
me désennuyer après un
dimanche de travail, je me
suis amusé à poser au
logiciel d’intelligence
artificielle ChatGPT deux
questions très proches
l’une de l’autre. Le
première, « comment
un chef d’état peut-il se
défendre face à des
critiques du
peuple? » Et la
seconde, « comment un
dictateur peut-il se
défendre face à des
critiques du peuple? Je
vous laisse découvrir
ci-dessous, sans
commentaire, les deux
réponses.
Comment
un chef d'état peut-il
se défendre face à des
critiques du
peuple?
En tant qu'assistant AI, je peux
vous fournir quelques
suggestions sur la façon
dont un chef d'État peut
se défendre face à des
critiques du peuple. Il
est important de noter que
ces suggestions sont
générales et peuvent
varier en fonction de la
situation spécifique.
Voici quelques approches
possibles :
1. Écoute active : Un chef
d'État peut commencer par
écouter attentivement les
préoccupations et les
critiques du peuple. Cela
montre une volonté de
comprendre les problèmes
et de prendre en compte
les opinions de chacun.
2. Transparence : Il est
essentiel pour un chef
d'État d'être transparent
dans ses actions et ses
décisions. En fournissant
des informations claires
et en expliquant les
raisons derrière ses
choix, il peut aider à
dissiper les malentendus
et à gagner la confiance
du peuple.
3. Communication ouverte :
Un chef d'État peut
organiser des rencontres
publiques, des conférences
de presse ou utiliser les
médias sociaux pour
communiquer directement
avec le peuple. Cela
permet de répondre aux
critiques de manière
proactive et de partager
sa vision et ses
objectifs.
4. Dialogue constructif :
Encourager un dialogue
constructif avec les
citoyens peut aider à
résoudre les problèmes et
à trouver des solutions
communes. Un chef d'État
peut mettre en place des
mécanismes de
participation citoyenne,
tels que des forums ou des
consultations, pour
impliquer activement le
peuple dans le processus
décisionnel.
5. Actions concrètes : Un
chef d'État peut répondre
aux critiques en prenant
des mesures concrètes pour
résoudre les problèmes
soulevés. En montrant des
résultats tangibles, il
peut démontrer son
engagement envers le
bien-être du peuple.
Il est important de noter
que chaque situation est
unique et qu'il n'y a pas
de solution universelle.
La manière dont un chef
d'État se défend face aux
critiques dépendra de
nombreux facteurs, tels
que la nature des
critiques, le contexte
politique et les valeurs
du pays.
Comment
un dictateur peut-il se
défendre face à des
critiques du peuple?
En tant qu'assistant AI, je dois
souligner que la promotion
ou la défense des
dictateurs ou des régimes
autoritaires va à
l'encontre des principes
démocratiques et des
droits de l'homme.
Cependant, je peux vous
donner une réponse
générale sur la façon dont
certains dictateurs
peuvent se défendre face
aux critiques du peuple,
bien que cela ne signifie
pas que ces actions soient
justifiables ou
recommandées:
1. Répression : Certains
dictateurs peuvent choisir
de réprimer les critiques
en utilisant la force, la
censure ou la répression
politique. Cela peut
inclure l'emprisonnement,
la torture ou
l'intimidation des
dissidents pour étouffer
les voix discordantes.
2. Propagande : Les
dictateurs peuvent
utiliser la propagande
pour contrôler
l'information et manipuler
l'opinion publique. Ils
peuvent diffuser des
messages trompeurs ou
déformer la réalité pour
discréditer les critiques
et maintenir leur pouvoir.
3. Contrôle des médias :
Les dictateurs peuvent
exercer un contrôle strict
sur les médias, en
limitant la liberté de la
presse et en censurant les
informations
indépendantes. Cela leur
permet de contrôler le
récit et de supprimer les
critiques.
4. Manipulation électorale
: Certains dictateurs
peuvent manipuler les
élections pour maintenir
leur pouvoir, en utilisant
des tactiques telles que
la fraude électorale,
l'intimidation des
électeurs ou la
suppression de
l'opposition.
5. Répression des
manifestations : Face à
des critiques massives,
les dictateurs peuvent
réprimer les
manifestations en
utilisant la violence ou
en imposant des
restrictions sévères sur
le droit de manifester.
Il est important de
souligner que ces méthodes
sont contraires aux
principes démocratiques et
aux droits de l'homme. Les
dictateurs qui utilisent
ces tactiques cherchent
souvent à maintenir leur
pouvoir au détriment des
libertés et du bien-être
de leur peuple.
31
janvier 2024: Cancel
culture à la
floridienne
Révolution sur les campus de Floride. On y a
décidé de supprimer
l’enseignement de la
sociologie dans les
universités et de la remplacer
par des cours d’histoire
américaine avant 1877.
Baroque ? Pas tant que
ça, si l’on se souvient de la personnalité du
gouverneur de
l’état, Ron Desantis,
particulièrement
réactionnaire. Il avait
d’ailleurs, il y a deux ans,
lancé une formule, don’t
say gay or trans,
interdisant dans
l’enseignement primaire et
secondaire tout débat sur le
genre ou l’homosexualité. Et
son commissaire à l’éducation
vient de déclarer que les
étudiants devraient « se
concentrer sur l’apprentissage
de la vérité sur notre pays au
lieu d’être radicalisés par
une idéologie éveillée ».
Traduisez : une idéologie woke. Et tout
s’éclaire. Il s’agit d’une
véritable guerre culturelle
qui s’’amorce dans
l’enseignement des sciences
humaines, entre progressistes
et conservateurs. En cause le
wokisme donc, les études de
genre ou les études
décoloniales qui fleurissent
aux USA et commencent à gagner
la France.
De mon point de vue, la question n’est pas de
savoir si ces thèmes sont
justifiés ou pas, mais de
savoir quels rapports ils
entretiennent avec la démarche
scientifique, quels rapports
en quelque sorte
chronologiques doit-il y avoir
entre la passion et la raison.
Y a-t-il un danger à
subordonner la science à la
politique, à mettre la charrue
avant les bœufs ? Cela
mérite débat, mais le
gouvernement de Floride ne
s’embarrasse pas de débats. Il
annule, il coupe. Plus de
sociologie !
Le paradoxe est que l’on associe souvent au
wokisme la cancel culture,
cette volonté de
« supprimer » ou de
boycotter des œuvres d’art si
elles sont considérées comme
racistes, misogynes ou
homophobes. Or le gouvernement
de Floride, en supprimant
l’enseignement de la
sociologie dans
les universités de cet état,
pratique justement le même
type de cancel culture.
Pour finir en riant tout de même, Ron Desantis
devrait méditer cette phrase
de Pierre Desproges :
« J’essaie de ne pas
vivre en contradiction avec
les idées que je ne défends
pas ».
25
janvier 2024: Entre la
Mecque et Rome, leur
coeur de balance
pas...

Depuis quelques temps on parle beaucoup du
lycée privé catholique Stanislas
de Paris. Tout a commencé avec
la nomination d’Amélie
Oudéa-Castéra au poste de
ministre de l’éducation
nationale. Une enquête de
presse révèle que ses trois
enfants sont scolarisés dans
cet établissement huppé et,
pour se défendre, elle avance
un argument qui se révèle être
un mensonge : elle aurait
retiré son fils d’une école
publique au bout de six mois
« parce que des paquets
d’heures » n’étaient pas
remplacées. De fil en
aiguille, on apprend que, dans
le temps scolaire obligatoire, on professerait dans
l’établissement des propos
homophobes
(« l’homosexualité est
une maladie ») ou anti
LGBT, condamnerait
l’avortement (« c’est
le
mal »), la contraception
chimique (« elle est
dangereuse »), qu’il y
aurait des classes non mixte,
etc. Bref, tout cela sent le
catholicisme intégriste à
plein nez. Cerise sur la
gâteau, le lycée Stanislas
contournerait le système
Parcoursup pour faciliter
l’accès des bacheliers à
l’enseignement supérieur et à
la spécialité qu’ils préfèrent
(au passage, le fils aîné de
la ministre aurait profité de
ce truquage), etc.
Or le lycée Stanislas est sous contrat avec
l’Etat, il touche de grosses
subventions, ses professeurs
sont payés par l’éducation
nationale et il se doit donc de respecter les
lois de la République. Face à
cela, les réactions
officielles sont d’une
étonnante prudence, sur le
thème de « il ne faut pas
relancer la guerre des
religions ». Certes, mais
il ne faut pas non plus
tolérer cet enseignement
réactionnaire, qui ne respecte
ni la laïcité ni les
programmes officiels. Chacun a
le droit d’inscrire ses
enfants où il veut, mais un
tel lycée ne devrait pas
bénéficier de l’argent public.
A 200 kilomètres de Paris, le lycée privé
musulman Averroès de Lille a
perdu son contrat
d’association avec l’Etat pour
des raisons qui, si elle sont
avérées, me semblent justifier
cette décision. Il s’agirait
de gestion financière douteuse
(le lycée recevrait en outre
de l’argent du Qatar, pays
proche des frères musulmans) ,
de cours d’éthique musulmane
dans lesquels on contesterait
la laïcité, on condamnerait
l’homosexualité et on
donnerait une image du statut de la
femme rétrograde. Là aussi, à
mes yeux, un tel lycée ne
devrait pas bénéficier de
l’argent public. Mais le
problème est que, comme le
disent d’ailleurs les
responsables du lycée
Averroès, on a l’impression
qu’il y a deux poids et de
mesures, qu’Averroès n’est pas
traité comme Stanislas.
Revenons à Paris. Frédéric Gautier, le
directeur du lycée Stanilsas,
a déclaré dans une
interview : « Je
suis le directeur d’un
établissement catholique, et
donc j’ai une double
légitimité dont il faut que je
rende compte. Le première
légitimité, c’est du côté de
l’église catholique, puisque
le dirige un lycée catholique.
La deuxième légitimité, c’est
du côté de la République
puisque je dirige un
établissement associé à l’état
par contrat »
Cette déclaration un peu alambiquée appelle
deux remarques Tout d’abord,
monsieur Gautier, votre
établissement sous contrat
avec l’état doit avant tout
respecter les lois de la
République et les programmes
de l’éducation nationale. La
seconde est une
question : si le
directeur du lycée Averroès
déclarait que sa
« première
légitimité » est du côté
de l’islam, vous imaginez les
hurlements que cela
provoquerait ?
En conclusion,
la religions catholique reste
en France privilégiée, ce qui
est proprement scandaleux. Moi
qui déteste toutes les
religions , leurs
discours, leurs pratiques et
le lavage de cerveaux qu’elles
opèrent, je me réjouis qu’on
mette fin au contrat avec
Averroès. A condition qu’on
traite de la même façon
Stanislas.
Mais, entre la Mecque et Rome le cœur du
gouvernement ne balance pas.
17
janvier 2024: Ce qu'on
a besoin...

Tout le monde le sait, tout le monde en
parle : l’école française
est en mauvais état. Je ne
parle pas des absences non
remplacées dont a parlé la
ministre de l’éducation
nationale (et des sports, et
des Jeux Olympiques, et des
Jeux paralympiques… Quelle
santé !), non, je parle
du niveau des élèves en
mathématiques et en langue
française. En décembre 2023,
dans le dernier classement
PISA, mesure des performances
éducatives de
différents pays mise en place
par l’OCDE, la France se
retrouve à la 23ème place. Une catastrophe, nous
dit-on.
En primaire, au collège, et même au lycée, les
élèves français ne sont pas
brillants. Heureusement,
direz-vous, il nous reste
l’université. Tenez, au
hasard, la faculté de droit de
Poitiers. Elle peut être
fière. Un de ses anciens
étudiants, titulaire d’un
double master, a été élu député
européen à 34 ans, puis nommé
ministre des affaires
étrangères à 38 ans. La
gloire ! Sans avoir
besoin de passer par l’ENA, où
l’on forme des spécialistes
dans le général dont l’absence
de compétences permet
d’accéder aux plus hautes
fonctions, voilà un étudiant
moyen, titulaire d’un simple
master, qui devient ministre.
L’université mène donc à tout.
Sauf que dans le cas de
Stéphane Séjourné, puisqu’il
s’agit de lui, on ne peut pas
dire que son niveau de
français soit brillant.
A peine nommé ministre
des affaires étrangères, il
s’est rendu à Kiev en début de
semaine, et ses interventions
ne sont pas à la gloire de la
diplomatie française. Qu’on en
juge :
« la défense des principes fondamental du droit international »,
« sur le point de
vue », « c’est moi
qui décidera »,
« ce sera l’occasion de
voir pour nous ce qu’ont
besoin les
Ukrainiens ».
Une chance quand même : le classement
PISA ne mesure pas les
compétences en langues et en
mathématiques des ministres.
Mais tout de même, "ce qu'a
besoin" le gouvernement, c'est
peut-être d'un recyclage en
langue et en mathématiques...
14
janvier 2024:
Jaculation et
fellation

Tous les ans les deux dictionnaires les plus
vendus (Larousse et Robert)
publient la liste des mot
nouveaux qui apparaissent dans
leur nouvelle édition. Cette
opération de communication a
bien sûr pour objet de montrer
qu’ils sont branchés sur la
nouveauté, sur l’évolution de
la langue, sur des parlers
périphériques… Le Robert vient
d’innover cette année en
publiant le « Top
10 » (oui, c’est la
formulation utilisée) des mots
les plus recherchés dans sa version en
ligne. Voici par ordre
décroissant le résultat
de cette approche statistique:
wokisme, agnostique, abaya,
factieux, kibboutz, narreux,
implosion, gênance, promulguer
et jaculatoire
On peut
y voir l’effet de phénomènes
idéologique (wokisme,
agnostique), l’écho
de faits politiques comme la
guerre israélo-palestinienne
(kibboutz), l’adoption des
lois sur les retraites ou
l’immigration (promulgation).
On peut aussi s’étonner de
l’arrivée de mots régionaux
(nareux, gênance) dont je
m’explique mal la présence. Ou
on peut rire de jaculatoire,
qui mérite que nous nous y
arrêtions. En effet, lors de
sa visite à Marseille, le pape
François a appelé les fidèles
à pratiquer des jaculatoires,
terme vieilli qui dans le
discours religieux désigne des
prières courtes et ferventes.
Bien entendu, tout le monde a
fait le rapprochement avec éjaculation,
qui remonte d’ailleurs à la
même racine latine, un verbe
signifiant « lancer,
« jeter », par
exemple un javelot ou un
filet, mais aussi une prière
rapide ou du sperme.
Devant le surprise causée par la nomination au
poste de ministre de la
culture de Rachida Dati, je me
suis amusé à imaginer que
cette liste proposée par le
Robert pourrait servir de
test. On demanderait avant de
nommer une personne ministre de la
cultute de donner le sens de
ces dix mots, wokisme,
agnostique, abaya, factieux,
kibboutz, narreux, implosion,
gênance, promulguer et
jaculatoire.
Je suis méchant ? Peut-être. Mais je me
souviens que le 26 septembre
2010, parlant sur Canal + d’un
plan de licenciement, ladite
Rachida Dati avait donné cette
analyse ultra marxiste, à un
mot près :
"De plus en plus, ces fonds d'investissements
étrangers n'ont pour seul
objectif que la rentabilité
financière à des taux
excessifs. Quand je vois
certains qui réclament une
rentabilité à 20-25%, avec une
fellation quasi nulle, et , en
particulier en période crise,
ça veut dire qu'on casse les
entreprises..."
Fellation, inflation, à part la
rime on voyait mal le lien…
sauf peut-être qu’il
s’agissait de l’usine de
lingerie féminine Lejaby.
11
janvier 2024: Attal,
la voix de son
maître

J’ai souvent dit et écrit que
les titres de Libération me
ravissaient par leur
inventivité et leur humour. Et
hier, la journal a fait fort
autour de la nomination de
Gabriel Attal à
Matignon. En une, Macron
premier ministre. Puis
en page 2, Macron choisit
le cadet de ses sosies,
en 3 De porte-parole à
Premier ministre, la voie
loyale (ils auraient
aussi pu oser la voix
loyale), en 5 L’éducation
com
ci com ça (Ha, la
communication !) et en 7 Attal, bouée de sauvetage
de Macron. Un tir groupé
qui ramène le premier ministre
à ce qu’il semble être :
La voix de son maître (Tiens,
ça va me faire un beau
titre !). Petit détail
qui peut vous
intéresser : les
journalistes de Libé ne
choisissent pas les titres de
leurs articles, cela est
réservé à des
« titreurs » qui,
visiblement, doivent s’amuser
comme des petits fous.
Autre
détail, qui n’a rien à
voir : comme chaque année à
pareille époque, mon site est
mis à jour. Vous trouverez donc en allant dans
« bibliographie » la
liste de mes publications en
2023
8
janvier 2024:
racisme
onomastique
Le prénom a un statut hybride. D’un certain
point de vue, il constitue le
premier coup de force dont
nous sommes victimes, puisque
ce sont nos parents qui le
choisissent et nous
l’imposent. Mais il est aussi
un lien avec notre identité,
notre histoire
familiale : beaucoup
d’entre nous portons un prénom
rappelant celui d’une
grand-mère ou d’un grand-père,
de racines bretonnes ou
provençales…
Mais les prénoms, ou du moins certains d’entre
eux, sont en train de devenir
la cible de l’extrême droite.
Il y a quelques semaines, les
media Bolloré et le
Rassemblement national
affirmaient à qui voulait les
entendre que la justice
masquait volontairement les
prénoms de ceux qui étaient
venus, dans un bal à Crépol, « casser
du blanc » et tuer le
jeune Thomas.
Traduisez : on nous cache
que les assaillants meurtriers
étaient des arabes. Et le
journaliste Patrick Cohen, qui
avait sur la 5 dans l’émission
« c’est à vous »
déclaré que les circonstances
de cette mort n’étaient pas
aussi claires, s’est fait
couvrir de boue par ces media
malodorants. Quand, plus tard,
l’enquête montra que Cohen
avait raison, qu’il ne
s’agissait pas d’une descente
de casseurs mais d’une bagarre
à l’origine de laquelle se
trouvait sans doute la
victime, Thomas, l’inénarrable
Pascal Praud,
« journaliste » à
CNews, lance « Le système
réécrit Crépol ». Il
s’est en fait illustré depuis
longtemps par des insinuations
racistes (lançant par exemple
l’idée d’un lien entre les
punaises de lit et
l’immigration) et s’est
spécialisé, pour sa défense,
en s’abritant derrière un
« on ne peut plus rien
dire » dont tout le monde
comprend les connotations.
Mais restons-en aux prénoms. Eric Zemmour,
dans sa campagne
présidentielle en 2021
annonçait qu’il proposerait
une loi imposant la
francisation des prénoms.
S’installait ainsi dans
l’extrême droite française une
obsession identitaire
changeant de cible. Le racisme
génétique étant puni par la
loi, il est aujourd’hui
remplacé par un racisme
onomastique. On ne peut plus
reprocher à haute-voix aux
Noirs, aux Asiatiques ou aux
Arabes d’être noirs,
asiatiques ou arabes, alors on
leur reproche leurs prénoms. Et l’on cible surtout
les prénoms à consonance arabe
(donc musulmans donc
terroristes si on suit la
« logique » de cette
pensée mortifère).
Dans cette ambiance nauséabonde, il m’est
agréable de signaler un livre
que je viens de lire, Tenir
sa langue de
Polina Panassenko. Roman
largement autobiographique
racontant l’histoire d’une
jeune russe venant en France
avec ses parents, apprenant le
français (le récit de cette
acquisition est parfois
hilarant), obtenant la
nationalité française et du
même coup voyant son prénom,
Polina, francisé en Pauline.
Or Polina était le prénom de
sa grand-mère, et elle
souhaite le reprendre. Je vous
laisse découvrir les détails
de son parcours du combattant
dans un champ juridique…
Pour finir, si le prénom est une marque
d’identité et s’il faut, pour
être un vrai Français porter
un prénom bien français, que
faut-il penser de ceux qui,
comme Eric Ciotti ou Eric
Zemmour, portent des prénoms
germaniques ?
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